Conférence
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Français
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Droit commun de la propriété intellectuelle
DOI : 10.60527/y5yn-ee27
Citer cette ressource :
Pour un partage des savoirs. (2016, 2 juin). Forum Nîmois - Charles GIDE - COLOSIMO - 2 juin 2016. [Vidéo]. Canal-U. https://doi.org/10.60527/y5yn-ee27. (Consultée le 2 juin 2024)

Forum Nîmois - Charles GIDE - COLOSIMO - 2 juin 2016

Réalisation : 2 juin 2016 - Mise en ligne : 9 novembre 2016
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Descriptif

L’activité de notre association Charles Gide reprend, pour son cycle de conférences "le forum Nîmois Charle GIDE" Jean MATOUK président de l'assosiation et professeur des universités recoit, le 2 juin 2016, à la maison du protestantisme à Nîmes, JeanFrançois Colosimo

 

Il faut remercier très vivementJean François Colosimo d’avoir accepté de venir nous parler à Nîmes, malgré lesgrèves.

Introduction par Jean Matouk président du Forum Charles Gide

Il nous est arrivé d’Avignon, ou,avec l’autorisation de la CGT…. il a pu déjeuner avec son père avant de veniren bus jusqu’à Nîmes. Jean François est né, en effet, à Avignon en 1960, puis afait des études d’histoire, philosophie et théologie à Paris, à la Sorbonne, età l’Ecole pratique des hautes études. Il a également  étudié dans des universités grecques, sansdoute pour se perfectionner sur l’orthodoxie byzantine,  et des universités américaines.

Il a été directeur de collectionsdans de nombreuses maisons d’édition Stock, Lattes, Odile Jacob, et auxEditions du Cerf où a été publiée son encyclopédie sur les religions, notammentle dernier tome sur «  Des hommes entrop, les chrétiens d’Orient ». C’est un essayiste fécond : enquatorze ans, depuis 2000, il a publié sept livres dont trois particulièrementpercutant : Dieu est américainen 2006 chez Fayard, L’Apocalypse russe,vers laquelle peut-être il dérivera ce soir, en 2008, également chez Fayard, etle Paradoxe persan en 2009 toujourschez Fayard

Mais il a également, et ce n’estpas fréquent, une filmographie importante avec cinq réalisation dont ladernière «  Iran, une puissance dévoilée », tournée sauf erreur en2009, était sur Arte mardi soir. Malheureusement, avec un remarquable Angleco,si bien que, refusant de choisir, ma femme et moi avons allumé les deuxtélévisions et allions de l’une à l’autre régulièrement, ce qui me permet devous dire ce soir que le film de Jean François Colosimo, était tout aussiremarquable. Et tout autant d’actu, comme on dit dans les Médias, compte tenudu regain général d’intérêt pour l’Iran, depuis qu’a enfin été signé cet accordsur le nucléaire. Le film de Jean François explique merveilleusementl’évolution de l’Iran antérieure à cet accord. Cerise sur le gâteau, notre amiet invité tout récent Hubert Vedrine, intervient dans le film sur l’Iran.

Vous avez vu, souvent, JeanFrançois Colosimo dans « C’est dans l’air », intervenant à propos dessoubresauts internationaux divers. Compte tenu de sa parfaite connaissancedes deux orthodoxies et de la Russie, nous avions l’intention de l’inviter pourparler spécifiquement de la Russie et du rôle que Poutine  fait jouer à l’Eglise orthodoxe russe dans son projet, légitime, de redonner uneplace à son pays dans le concert international, après l’effondrement sousEltsine et la captation  des énormes  ressources russes par quelques oligarques.

Mais on sait aussi le rôle de laRussie dans le conflit syrien.  Elle y apris une place indispensable pour un règlement et un retour de ce pauvre peuplesyrien vers la paix. Pour sauver ses points d’ancrage en Syrie, les quelques unqui  restent aux Russes dans le monde, aprèsleur éviction d’Afrique et la lente dé-communisation de Cuba, Poutine a pris leparti d’Assad, à qui l’histoire fait jouer le rôle le plus horrible demassacreur de son propre peuple.

Or, il se trouve que ce conflitsyrien, qu’on le veuille ou non,  renvoieaussi à des oppositions religieuses. La famille Assad, même si issue du partiBaas ( parti de la renaissance arabe) laïc à l’origine, se rattache auxalaouites, branche de l’Islam elle-même rattachée aux chiites. Face à unepopulation syrienne plutôt sunnite, les Assad sont apparus comme lesprotecteurs des chrétiens§ Exactement comme Saddam Hussein, lui aussi issu duBaasisme, en Irak.  Et il faut bienreconnaitre que les chrétiens d’Orient, déjà plutôt malmenés depuis unevingtaine d’années, ont eu quelques raisons de considérer Saddam Hussein,jusqu’en 2003, et  Assad comme unbouclier. Comme Poutine se présente, par ailleurs, comme un des hérauts de lachrétienté orthodoxe, tout cela mélange fortement politique, et mêmegéopolitique et religion.

D’autant que le proche Orient estaussi le siège d’un affrontement séculaire, mais en phase violente aujourd’hui,entre le wahhabisme saoudien, et le chiisme, directement en lutte au Yemen  et à Bahrein Perdure évidemment unaffrontement Palestine-Israël, que nous voudrions politique pour lui trouverune solution, mais qui est évidemment religieux aussi. Même si les livres deSchlomo Sand relativisent le sacré de la Bible, qu’il considère comme un« récit national », habilement imaginé par les Juifs après leurapparition il y a 3200 ans en Palestine, à partir de savants assyriens etpalestiniens.

A la base de  nombreuses contributions sur le sacré, la « Violence et le sacré » duregretté René Girard,  le Feu Sacré  de notre ami Régis Debray, ce constat qu’onpeut exposer trivialement en disant qu’aucune société ne se soude sur leréfrigérateur, la bagnole et le smartphone. Elle ne peut se souder,c’est-à-dire se stabiliser qu’autour d’un ou plusieurs «sacrés».  Nos ancêtres sapiens et peut-être néanderthaliensétaient constitués en groupes, familles, clans, tribus, autour de sacralisationsd’objets naturels, dont, par parenthèse, Hubert Vedrine nous disait l’autresoir, qu’elles auraient été plus favorables à l’écologie, que les religions duLivre.Jusqu’à Laudato Si, peut-être !

D’un point de vue démographique,les religions  sont des sous-sociétés, àl’intérieur d’Etats-nations, soudées sur une croyance en des divinités ou unDieu.  Dans nombre d’Etat, ces sous-ensemblesdominants ont imposé des siècles durant leur propre croyance. Cas ducatholicisme en France ! Cas du protestantisme luthérien dans les paysscandinaves ! Cas des pays musulmans !  Cas de l’Inde,  dans laquelle les deux religions, hindouisteet musulmane, ont été à l’origine de la séparation entre Inde et Pakistan !  Avant 1917, c’était l’orthodoxie qui dominaiten Russie. Puis ce fut une autre idéologie un autre « sacré », celuidu prolétariat dictant sa loi, au nom de laquelle s’imposèrent de nouveaux despotes,eux aussi de droit devenu n« divin ».

Finalement, face aux excès detoutes sortes des religions d’Etat,  tousles peuples d’Europe, ont inventé une forme de laïcité plus ou moins distantedes religions, en ce sens qu’aucune législation ne doit s’inspirer d’une seulereligion, ni privilégier l’une d’elle au nom de la liberté individuelle. Maisle président des Etats Unis continue à jurer sur la bible. Il y a des impôtspour les  religions en Allemagne. L’Egliseévangélique luthérienne est église nationale au Danemark, comme en Norvège. Onsait assez que la Pologne, avec l’Irlande, défendaient mordicus l’idéed’inscrire les racines chrétiennes de l’Europe dans le projet avorté de TraitéConstitutionnel, ce qui est historiquement juste mais choquait les tenantsd’une laïcité militante.

Il y a dix ans, la Turquie étaitsur le seuil de l’Europe. Pourtant, alors que c’est un état laïc, il y avait enFrance, comme dans d’autres pays, une opposition forte à son entrée dansl’Union européenne. Une opposition qui ne tenait qu’à la religion musulmane desturcs. Face à cette opposition Recip Erdogan, réélu sans cesse depuis 10 ans, afait volte-face, et ramène la Turquie hors de la laïcité, tout en jouant unrôle clé lui aussi dans le conflit syrien, ne serait-ce qu’avec le Traité qu’ilvient de signer avec l’UEMais il a aussi réactivé l’hostilité aux Kurdes qui,bien que musulmans, constituent une branche spécifique de l’Islam, et rêventd’un Kurdistan composé de terres actuellement syriennes, turques, et iraniennes,et se battent contre Daesch, dans cet espoir.

En Inde, outre l’hostilité auPakistan, en interne, le nouveau parti au pouvoir, le BP Baratiya Janata party,du président Modi a une base très droitière , très nationaliste , très hindouqui remet en vogue la zvastika inverse de celle du nazisme mais porteuse detout autant d’extrêmisme. Et accroit l’hostilité aux pays islamiques !

Le boudhisme et le confucianismequi dominent en Asie orientale sont-elles au contraire des croyances tellementnon prosélytes, qu’elles ne jouent pas ce rôle d’entretien du feusacré ?  Sans pourtant que lespeuples qui les ont pour « religion » au sens étymologique, nepuissent devenir guerrier. Question ou sous-question éventuelle pour vous,Jean François!

En tous cas, les relationsinternationale, la géopolitique, ne peuvent en aucun cas être analysées, etconduire à des pacifications, si on ignore leurs composantes religieuseset  leurs antagonismes, qui sont  les plus fondamentaux parce que constitutifsd’une culture. Voilà votre tâche de ce soir : nous faire savoir où, quandet comment, ces antagonismes vont cesser de générer, d’amplifier, et de fairedurer, la violence chaotique de notre monde.