Quand j'ai commencé mon travail de thèse, j'avais un peu un champ d'interrogation, mais il fallait que je précise et que je trouve un sujet de thèse.
Je travaillais déjà depuis quelques années sur les représentations du corps et je commençais à travailler aussi plus précisément sur la question du féminin.
Dans ce contexte, j'ai participé à un colloque où j'entends la présentation d'une gynécologue, d'une dermatologue qui explique l'existence de la nymphoplastie de réduction et donc je découvre l'existence de cette opération de chirurgie esthétique qui consiste à raccourcir les petites lèvres de la vulve.
Elles expliquent que 80 % des femmes qui s'adressent à elles ont un sexe dans la norme et qu'elles font cette demande d'opération pour des motifs esthétiques pour avoir une vulve plus belle.
Et donc je découvre avec étonnement qu'il y a donc des critères de normes du sexe féminin et des critères esthétiques.
Et ça m'a paru suffisamment passionnant pour avoir envie de faire ma thèse sur ce sujet et après d'en faire un livre.
En écoutant les femmes parler de leur sexe, de leur désir d'opération, de leur crainte aussi liée à l'opération.
D'un côté, de ce qu'on appelle une expérience clinique et de l'autre côté en travaillant sur les représentations dans l'histoire, dans l'histoire de la médecine, dans l'histoire de l'art, sur le sexe féminin, il y a dans un premier temps un niveau de problématique qui est apparu autour de la question de la norme et de l'idéal.
Puisque finalement ce qui apparaissait, c'était comment elles imaginaient et comment cette imaginaire rentrait en écho avec l'imaginaire collectif, qu'il fallait avoir un sexe idéalisé.
Et donc j'ai un peu travaillé sur cette question du rapport à la norme et à l'idéal.
Et en travaillant cette question-là, sont apparus derrière d'autres problématiques, des problématiques psychiques importantes qui ont trait aux sujets fondamentaux qui traversent les femmes.
La question du rapport au féminin, du rapport au sexuel, du rapport à la maternité.
Et finalement, j'ai pu entendre que dans ces demandes de nymphoplastie, toutes ces questions-là pouvaient être en jeu.
Pour comprendre ce qui était en jeu dans cette opération, c'était important de regarder ce qui s'était passé au niveau de l'histoire, de l'histoire de la médecine, de l'histoire des actes sur le sexe féminin, au niveau de l'histoire de l'art, au niveau de la sociologie, de l'anthropologie.
Et évidemment, moi, c'est à partir de la psychanalyse que je propose un regard sur cette pratique et sur le discours des femmes que j'ai entendu.
Parce que c'est à partir des piliers de la psychanalyse, l'écoute de l'inconscient, la question du sexuel, qu'il me semblait qu'il y avait quelque chose à entendre de particulier dans cette clinique-là.
Les médias parlent de plus en plus de cette opération.
Bon, ça reste quand même encore assez confidentiel.
Il y a encore beaucoup de personnes qui ne connaissent pas l'existence de cette opération.
Il y a eu, il y a quelques années aussi, la prise de parole de certaines personnes médiatiques qui peuvent faire référence, ou dans les séries, on en parle de temps en temps.
Donc tout ça, ça fait qu'il y a de plus en plus de gens qui s'y intéressent et probablement qu'on voit du coup dans les médias, de temps en temps, un peu au hasard de certaines lectures, des articles sur la nymphoplastie apparaître.
Évidemment que dans les médias plutôt dit féministes, on aura tout de suite une lecture beaucoup plus critique de cette opération.
Dans d'autres médias, c'est beaucoup plus descriptif.
Et puis, tout dépend aussi des personnes qui sont sollicitées pour répondre.
Les gynécologues qui pratiquent cette opération de chirurgie esthétique ont un discours qui explique pourquoi c'est une bonne chose de le faire et que ça aide les femmes qui se sentent complexées.
Donc ça dépend aussi un peu de quel type de point de vue, on veut faire apparaître dans un article.
Une des thèses principales de ce livre, c'est l'idée qu'il y aurait en fait une représentation.
Cette représentation, elle est collective et elle se retrouve dans le discours des patientes que j'ai pu rencontrer, qu'il existerait un vrai sexe féminin.
En fait, qu'il existerait un vrai sexe féminin qui dirait ce que c'est qu'être une vraie femme.
À partir d'un doute qui est un doute classique et partagé de qu'est-ce que c'est qu'une femme et qu'est-ce que c'est qu'un homme.
Et finalement dans cette clinique-là, ce qu'on entend, en tout cas ce que moi, j'ai proposé d'entendre, c'est comment, en construisant la représentation d'un sexe féminin qui soit un vrai sexe féminin, à savoir une pure fente vulvaire, quelque chose où rien ne dépasse, pas de poils, pas de peau, qui est bien lisse, bien normée, il y aurait là une possibilité de s'assurer d'être une vraie femme.
Et que donc finalement, on peut entendre qu'une des logiques à l'œuvre dans cette opération de chirurgie esthétique, c'est de conformer son sexe à une représentation normée de ce qui serait le vrai sexe féminin pour être assuré en retour d'être une vraie femme.
Nymphoplastie. Coupez ce sexe que je ne saurais voir
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