La monnaie de sucre dans les Antilles (XVIIe-XVIIIe siècles). À la croisée des histoires agraire et monétaire, de la Normandie à l’Amérique

Résumé de la communication : 

Sans argent-monnaie, ou très peu, les Français installés dans les îles des Petites Antilles à partir de 1625 ont fait du premier produit cultivé à grande échelle, le tabac, un moyen de paiement réglé. Puis, c’est une autre denrée issue de l’agriculture antillaise, le sucre, développé sous l’impulsion des seigneurs normands, qui le remplaça dès le milieu du XVIIe siècle. Il eut cependant un poids tout autre et acquit surtout un rang différent : d’instrument d’échange, le sucre gagna le statut de monnaie à l’articulation des années 1660-1670, au temps de la première Compagnie des Indes Occidentales. C’est un cas unique dans l’histoire monétaire de l’Europe moderne, qui remettait en cause la définition aristotélicienne de la monnaie à laquelle les acteurs des échanges transatlantiques étaient attachés pour ne connaître qu’elle, mais qui permit de servir le programme mercantiliste de la monarchie développé par Colbert. Le fulgurant succès de ce système monétaire atypique, ainsi que les raisons et les conditions de son abandon, sont considérés dans cette communication du point de vue de ceux qui participèrent à l’élaboration et l’expérimentation de pratiques nouvelles avec, notamment, la création d’une sorte de monnaie fiduciaire, le billet de sucre.

Biographie de l'auteur : 

Jérôme Jambu,  Professeur d’histoire moderne, Université du Havre Normandie, UMR IDEES