Notice
Littérature et chiffonnerie
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Descriptif
L’activité poétique de Baudelaire a coïncidé avec l’âge d’or de l’industrie du chiffonnage à Paris, sous la monarchie de Juillet et le Second Empire. À l’époque, on ramassait, recyclait tout, et les moindres rebuts retrouvaient un destin ; tout objet rejeté gardait une valeur sur le marché de la revente. Sans nier la validité des interprétations désormais classiques, attachées à la définition du monde moderne par l’obsolescence des choses, avant la « destruction créatrice » de Joseph Schumpeter, et justifiées par la passion de Baudelaire pour la modernité comme beauté éternelle à extraire des modes fugitives, il importe de les réconcilier avec un fait économique, social, culturel et littéraire massif et incontestable. Le moment historique dont Baudelaire fit l’expérience fut un temps qui ne laissait pas de restes, où les bilans, les vers, les billets doux, les procès et les romances, si le poète les avait descendus de sa mansarde dans la rue, auraient été ramassés aussitôt par un chiffonnier au coin de la borne et revendus au poids à l’entreposeur pour refaire du papier ou du carton, car leur place était prescrite dans le cycle industriel de la papeterie.