Neuro-réalisme, un projet irréaliste, réaliste ou surréaliste ?

Résumé de la communication : Les travaux de Jocelyn Benoist cherchent, avec courage et humilité, à "rendre justice au réel" en refondant une approche philosophique réaliste qui éviterait les apories et les écueils auxquels s'exposent de telles thèses. J'apporte ici ma contribution, — fondée sur une approche qui combine les neurosciences cognitives et la neuropsychologie de la conscience au questionnement philosophique —, en proposant une conception réaliste "sur-réaliste". Lorsque l'on explore les modalités de notre "accès au réel", on encourt le risque d'entretenir un "dualisme résiduel" (pour reprendre la belle expression de Dennett) d'une manière plus ou moins explicite : comme s'il y avait ma perception du réel d'une part, et le réel d'autre part. Dès lors que l'on considère que notre traitement subjectif personnel (ou collectif) du réel fait nécessairement partie de ce dernier, il me semble que nombre d'apories et difficultés peuvent être résolues, tels que les écueils relativistes. Nous interprétons subjectivement la réalité dont nous faisons partie, et nos "Fictions Interprétations Croyances" (FICs) ne se substituent pas à elle, mais elles l'enrichissent à chaque fois de pans de réalité supplémentaires. Ce "sur-réalisme" permet également de souligner la dimension morale de nos FICs qui sont parties prenantes du réel. À partir de cette conception, je revisite le concept de représentation, je discute certains résultats récents des liens profonds entre temps subjectif et cartes cognitives de l'espace, et j'explore la dimension cinématographique de la perception et plus largement du "flux" de la conscience.

Biographie de l'auteur : Neurologue à la Pitié-Salpêtrière, professeur à la faculté de Médecine de Sorbonne Université, auteur de nombreux livres, ancien membre du Comité consultatif d'éthique, Lionel Naccache partage son quotidien entre recherche, clinique et écriture pour tenter de percer les mystères de la conscience. Il est titulaire d'un doctorat (1998) et d'une thèse de sciences cognitives (2002). En 2009, il a été nominé au "Rising Star of Psychology" par l'Association of Psychological Science, aux États-Unis. Il a reçu le prix Le Goff, Lemonon, Houry, Laveran de l'Académie des sciences en 2011.