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Langue :
Français
Crédits
Jean René BORELLY (Réalisation), Olivier Sauvage (Intervention), Arnaud Verret (Intervention), Manon Raffard (Intervention), Éléonore Reverzy (Intervention)
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CC BY NC SA
DOI : 10.60527/s1zx-v628
Citer cette ressource :
Olivier Sauvage, Arnaud Verret, Manon Raffard, Éléonore Reverzy. CNRS_Pouchet. (2021, 22 juin). Emile Zola. La Curée. La Curée des sens , in Journée d'étude : La curée. Empire et emprise de la chair. [Vidéo]. Canal-U. https://doi.org/10.60527/s1zx-v628. (Consultée le 5 décembre 2024)

Emile Zola. La Curée. La Curée des sens

Réalisation : 22 juin 2021 - Mise en ligne : 22 juillet 2021
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Descriptif

Émile Zola. La Curée. Empire et emprise de la chair

 

Séance 2 : La Curée des sens 

Séance Présidée par Eléonore Reverzy

 

Intervention :

- Manon Raffard : "Comme l'attouchement d'une main moite de volupté". Toucher, genre et sexualité dans La Curée.

- Olivier Sauvage  : La musique dans La Curée : entre fascination et rejet, les ambiguïtés de Zola 

- Arnaud Veret  : Un motif oublié : la peau de l'ours et l'amour charnel dans La Curée d'Emile Zola.

Le 5 novembre 1871, la rédaction du quotidien La Cloche interrompt la publication en feuilleton de La Curée, alors que le Parquet menace d’entamer des poursuites judiciaires en raison des nombreuses plaintes de lecteurs. Au lendemain de cette interruption, Zola défend la moralité de son roman dans une lettre à Louis Ulbach, le directeur du quotidien. Dans cette lettre qui sera publiée dans La Cloche, le romancier déclare avoir voulu peindre le « bruit grandissant des orgies » afin de condamner l’« éclat de débauche qui éclaire le Second Empire », sans cependant avoir « osé tout dire ».

 L’épisode qui provoque la censure est celui du café Riche, alors que Maxime et Renée s’apprêtent à partager leur première nuit d’amour. Certes, cette scène produit un effet de choc, mais elle n’enfreint pas totalement le tabou de l’inceste puisqu’aucun lien de sang n’existe entre les deux personnages. C’est là toute la stratégie narrative de Zola dans cette œuvre : faire des allusions à des comportements moralement réprimés à l’époque afin de provoquer critiques littéraires et lecteurs, dans un jeu subtil entre le dit et le non dit. La critique littéraire contemporaine fait écho au scandale que suscite le roman : le deuxième volume du cycle des Rougon-Macquart est qualifié de « simple ordure » par Covielle dans Le Figaro, ou encore de roman « ardent, excessif » par Jules Claretie dans L’Illustration. Pourtant, dans La Curée, Zola voulait fustiger la « vie à outrance » du Second Empire et la corruption morale et politique de ce régime grâce à une écriture visant à mettre au jour la subversion du vieux Paris par les travaux haussmanniens et l’inversion des valeurs qui en sont la cause autant que le symptôme. La ville devient une gigantesque alcôve : les relations entre l’intérieur et l’extérieur, le public et le privé, les pères et les fils, les hommes et les femmes s’en trouvent alors subverties

C’est dans cette perspective que l’on peut comprendre la dissonance, voire la discordance entre le sexe, le genre et la sexualité des personnages qui peuplent le roman. Si de nombreux personnages principaux et secondaires sont marqués par une identité de genre ambiguë et labile, ce trouble ne semble pas affecter leur sexualité qui demeure dans la norme hétérosexuelle. Parmi eux, citons Renée, qui adopte des comportements et des attributs virils ; Maxime, dépeint comme le type même du « petit crevé » et l’« homme-femme des sociétés pourries » mais qui n’entretient aucune relation homosexuelle. Inversement, le genre des personnages aux sexualités non normatives comme les lesbiennes Sidonie Rougon, Suzanne Haffner et Adeline d’Espanet, le valet homosexuel Baptiste n’est, quant à lui, pas remis en question, même si ces personnages sont marginalisés par leur position secondaire dans le récit. Alors que la doxa de l’époque souligne plutôt la discordance entre sexe et sexualité en associant étroitement inversion sexuelle et transgression de genre, La Curée montre que Zola envisage d’autres configurations dans le roman, sans parler d’autres personnages qui soulèvent des questions intrigantes, à l’instar de Louise de Mareuil, dont le genre demeure incertain et que son infirmité semble priver de toute sexualité. Zola choisit en outre de la marier à Maxime, qui est un peu son miroir en raison de l’ambiguïté de son identité sexuelle.

 

Le 150e anniversaire de la censure du feuilleton de La Curée est l’occasion de se pencher sur la déliaison du genre et de la sexualité des personnages dans cette œuvre, grâce aux nouveaux regards apportés par les études de genre, les études gays et lesbiennes et les queer studies. Cette discordance est-elle le signe d’une pensée moderne non-essentialisante ou le symptôme de la décadence du Second Empire que Zola cherche à flétrir dans ce roman ? La question est de savoir si la distinction opérée entre sexe, genre et sexualité est un élément d’une satire réactionnaire ou une articulation plus moderne et plus fluide de ces catégories. Si cette journée s’inscrit dans le sillage des études culturelles et des études de genre, elle vise aussi à montrer les liens féconds qu’elles peuvent entretenir avec des approches plus classiques de la critique littéraire (génétique, poétique, histoire). C’est aussi à ce dialogue des méthodes et des démarches épistémologiques que nous souhaitons modestement contribuer.

 

 

Intervention

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