Entretien
Chapitres
Notice
Lieu de réalisation
Bibliothèque de l'IBPC, Paris 5e.
Langue :
Français
Crédits
Alexandre MOATTI (Publication), FMSH Production (Production), Quentin CENSIER (Réalisation), Diane Dosso (Intervention), Anne Joliot (Intervention), Pierre Joliot (Intervention)
Conditions d'utilisation
cc-by-sa avec mention des intervenants, de l'éditeur, du réalisateur et de FMSH Production
DOI : 10.60527/q0xa-ne64
Citer cette ressource :
Diane Dosso, Anne Joliot, Pierre Joliot. cultureGnum. (2021, 20 octobre). Témoignages d’Anne et Pierre Joliot – Institut de biologie physico-chimique. [Vidéo]. Canal-U. https://doi.org/10.60527/q0xa-ne64. (Consultée le 4 octobre 2024)

Témoignages d’Anne et Pierre Joliot – Institut de biologie physico-chimique

Réalisation : 20 octobre 2021 - Mise en ligne : 16 décembre 2021
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Descriptif

Intervenants :Pierre Joliot – Anne Joliot – Diane Dosso (responsable des archives de l’IBPC) (durée 1h18mn).

 

Diane Dosso dresse un historique de l’IBPC. Avec l’appui d’Edmond de Rothschild (1845-1934), il est fondé par ceux qui étaient affectueusement appelés les « tétrarques », quatre scientifiques : le physicien Jean Perrin (1870-1942), le chimiste Georges Urbain (1872-1938), le physiologiste André Mayer (1875-1956) et le neurochimiste Pierre Girard (1879-1958), qui sera en outre le premier administrateur de l’Institut, du début jusqu’à 1958. L’architecte en est Germain Debré (1890-1948), frère du Pr Robert Debré.

Elle rappelle que parallèlement, les frères Rothschild finançaient des bourses de voyage pour les scientifiques (comme le faisait la fondation américaine Rockefeller au profit de chercheurs français, cf. notre vidéo sur Jean Cavaillès, 1903-1944) ; elle-même a trouvé dans les archives de l’IBPC des « bulletins de subvention » de la Fondation Rothschild à de jeunes scientifiques, parisiens comme provinciaux.

La famille est restée très présente dans la gestion de l’Institut : après le décès du baron Edmond en 1934, c’est sa fille Alexandrine qui reprend le flambeau, suivant les volontés de son père, puis à partir de 1952 son frère Maurice (1881-1957),enfin le petit-fils du fondateur Edmond II (1926-1997). En 1998, à la mort de ce dernier, la gestion de l’IBPC passe de la Fondation au CNRS.

Diane Dosso rappelle aussi le profil de plusieurs femmes liées à l’IBPC, et oubliées de nos jours. Lydia Luzanowsky (1899-1986) est une sculptrice de renom : c’est elle qui fait le magnifique buste en bronze de Jean Perrin qui trône dans la bibliothèque (1930). Denise Lévy-Astruc (1891-1978) est l’archiviste et« biographe » de l’IBPC, auteure en 1968 d’un intéressant ouvrage sur l’Institut. Jeannine Yon-Kahn (1927-2020) fut le premier étudiant à passer sa thèse à l’IBPC (dir. René Wurmser), en 1955. Sans oublier la biochimiste Nine Choucroun(1896-1978), qui fit toute sa carrière à l’IBPC (elle fut par ailleurs la compagne de Jean Perrin avant sa mort en 1942), y travaillant jusqu’à sa mort.

Comme le rappelle Michel Morange, « c’est dans les locaux mêmes de l’IBPC que J. Perrin et A. Mayer élaborèrent le projet d’un organisme national de la recherche scientifique », qui sera créé en 1939, sur ce modèle-même de l’Institut.

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Mme Anne Joliot, née Gricouroff, évoque sa grand-mère venue de Russie : engagée dans les mouvements anarchistes russes, elle doit s’exiler en 1904 après l’échec d’une première révolution. Le père d’Anne, Georges Gricouroff, fréquente l’école libertaire La Ruche  à Rambouillet ; Georges et sa sœur sont aussi scolarisés à Paris, où enfants ils se lient d’amitié avec les enfants Perrin, Aline et Francis. Jean Perrin propose à Véra Gricouroff (la grand-mère d’Anne) un emploi de « calculatrice » à l’Observatoire de Paris ; puis en 1930 il lui propose de devenir bibliothécaire de l’IBPC, qui venait d’être fondé. Elle est aussi progressivement introduite à l’Arcouest, lieu breton de villégiature de ces familles scientifiques parisiennes à partir du début du XXe s. (et…jusqu’à nos jours).

Puis Anne Joliot évoque son père Georges Gricouroff (1899-1993), qui fut médecin et dirigea pendant quasi 50 ans le service d’anatomo-pathologie de l’Institut Curie (comme Pierre Joliot de nos jours, Gricouroff travailla longtemps à ses recherches après sa retraite). Ainsi que sa sœur ainée Nadine, géographe, qui épousa Nils Perrin, petit-fils de Jean Perrin.

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Pierre Joliot est entré à l’IBPC en 1953, et y travaille toujours – depuis bientôt 70 ans ; il revient sur les caractéristiques d’organisation de l’IBPC, telles que voulues par Perrin ; puis évoque un certain nombre de figures de scientifiques de l’Institut ou gravitant autour.

Jean Perrin avait toutes les caractéristiques de ce qui pouvait s’appeler un« mandarin » : avec néanmoins la conscience très forte de l’importance fondamentale des « jeunes chercheurs » (comme on les appellerait maintenant). Il prôna décentralisation et indépendance : les « jeunes chercheurs pouvaient se consacrer à temps plein à la recherche – ce qui était nouveau à l’époque. Dans cet esprit, Pierre Joliot s’est voulu« administrateur » de l’Institut (comme au Collège de France) plutôt que son directeur.

Pierre Joliot a des souvenirs de Louis Rapkine (1904-1948) par ce que lui en disait son père Frédéric. Rapkine a été l’élément moteur de l’émigration aux US et en UK de scientifiques avant et pendant la guerre (avec Henri Laugier, 1888-1973),ainsi que de la reconstitution d’une recherche française en biologie juste après-guerre (Diane Dosso lui a consacré sa thèse en 1998).

La période de Vichy est brièvement évoquée, le chimiste Pierre Girard (1879-1958), qui fut le premier administrateur de l’Institut de 1928 à 1958, dut se battre contre la tentative d’annexion de l’Institut par la Fondation d’Étude des Problèmes Humains du médecin prix Nobel Alexis Carrel, fort en cour sous Vichy.

Joliot est dès l’entrée dans son bureau « recruté » par le biophysicien René Wurmser (1890-1993), second « directeur »de l’Institut après Pierre Girard en 1958. Wurmser lui conseille le sujet de la biologie de la photosynthèse (sur lequel lui-même avait travaillé pendant sa thèse quarante ans plus tôt), sujet peu exploré à l’époque, et Joliot y travaillera toute sa vie. Wurmser a participé à la naissance d’une biophysique moderne, et a permis, contre l’hégémonie de la biophysique classique, l’avènement de la biologie moléculaire française à la fin des années 1950, en soutenant les « jeunes chercheurs » (au moins les deux premiers)Jacob, Monod, Lwoff.

Boris Ephrussi(1901-1979) sera chercheur à l’Institut avant-guerre (chargé de service adjoint en Biologie), et de 1946 à 1959 chef du service de génétique – un des promoteurs de la génétique, discipline qui avait du mal à faire sa place en France ; il y accueillit Piotr  Slonimski (1922-2009) – il y avait parfois des heurts entre ces deux fondateurs de la génétique mitochondriale.

Edgar Lederer(1908-1988), fit, comme Ephrussi, des séjours à l’Institut avant-guerre ;de retour après-guerre, il y fut chef du Service de Chimie des Substances Naturelles de 1947 à 1960, avant de fonder l’Institut de chimie des substances naturelles à Gif-sur-Yvette (CNRS) – comme Ephrussi qui crée à Gif le laboratoire de génétique moléculaire au même moment. Tous deux ont créé leur discipline à l’Institut, avant de la développer de manière autonome au CNRS à Gif.

Pierre Joliot évoque de manière subtile sa relation d’administrateur avec les Rothschild – il a connu le baron Edmond II (1926-1997). Celui-ci s’entendait très bien avec un des grands administrateurs précédents, le biochimiste Bernard Pullman(1919-1996), administrateur de 1963 (en succession de R. Wurmser) à 1989.Initialement prévenu contre P. Joliot (pour des raisons politiques ?), E.de Rothschild modifia favorablement son opinion. Il assista quasiment à tous les conseils d’administration jusqu’à sa mort en 1997. Pierre Joliot, administrateur de 1994 à 2001, assure la transition du statut, de la Fondation Rothschild vers le CNRS. Sans renier cela bien évidemment, il regrette que la Fondation n’ait pas continué à s’intéresser à l’Institut. Époque révolue sans doute.

Enfin, de manière plus subtile encore, en tout cas fort émouvante, Pierre Joliot évoque ses relations avec son père – il habita avec lui jusqu’à sa mort en 1958 (sa mère Irène meurt en 1956) ; les conseils que son père lui donna pour sa carrière – ne pas s’orienter vers la physique en route vers le gigantisme, être capable de faire soi-même ses propres expériences ; malgré les relations parfois orageuses qu’avaient le père et le fils (pour des raisons politiques confie-t-il : il ne comprenait pas pourquoi son père n’avait pas rompu avec le PCF en 1956), leur dialogue fut toujours intense quant à la vision de la science et de la recherche.

(synthèse de l'intervention vidéo réalisée par Alexandre Moatti, décembre 2021)

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Synopsis de la vidéo (pour accéder à une partie, cliquez dans les rubriques déroulantes à droite de la vidéo):

  • Introduction de Diane Dosso
  • Mme Joliot et sa famille Gricouroff
  • L’idée fondamentale de Jean Perrin
  • Louis Rapkine
  • P. Joliot recruté par René Wurmser dès son arrivée
  • B. Ephrussi & P. Slonimski
  • Brève évocation de l’Institut 1940-1944 (P. Girard)
  • Gouvernance de l’Institut, dès son origine
  • Edgar Lederer
  • René Wurmser (2)
  • 52’19Nine Choucroun
  • Gouvernance (2) et « tradition scientifique »
  • Gouvernance (3) et « évolution régénératrice »
  • Relations avec les Rothschild
  • Avec son père Frédéric Joliot
  • Conclusion : le passé de la recherche est son avenir

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Bibliographie

  • Michel Morange, « L’Institut de biologie physico-chimique de sa fondation à l’entrée dans l’ère moléculaire », La revue pour l’histoire du CNRS, 7 | 2002, OpenEdition.
  • [PDF81 pages] L’IBPC par ceux qui l’ont fait, dir. N. Chevassus-au-Louis& F.-A. Wollman, mai 2010, PDF.
  • [PDF21 pages, affiches d’exposition sur les grilles de l’IBPC, à l’occasion des 80ans du CNRS en 2019] L’IBPC, l’étincelle originelle du CNRS, 2016, PDF.
  • Denise Lévy-Astruc, Histoireofficielle, officieuse et marginale de l’Institut de Biologie Physico-Chimique. Fondation Edmond de Rothschild. D'Avril 1927 à Décembre 1958 (livre rare,1968) (édition numérique réalisée en mai 2020 par François Lapadu-Hargues, petit fils de Pierre Girard, PDFen ligne). 
  • Diane Dosso, Louis Rapkine (1904-1948) et la mobilisation scientifique de la France libre. Thèse de doctorat d'Histoire, Université Paris VII-Denis Diderot, 1998 (dir. D. Pestre)
  • Diane Dosso, « Le plan de sauvetage des scientifiques français », Revue de Synthèse, Springer Verlag/Lavoisier, 2006, 127 (2), pp.429-451
  • Diane Dosso, 5. La Seconde Guerre mondiale et l'exil des scientifiques aux États-Unis, L'argent de l'influence, Autrement, pp.105-124, 2010
  • Edouard Launet, Sorbonne Plage, éd. Stock, 2016
  • Vidéo cultureGnum,Denis Guthleben (CNRS), 'La création des institutions scientifiques françaises' (2017).
  • Hervé Le Ferrand, « Une présence dijonnaise aux origines du CNRS ? Paul Appell et André Job membres du Comité scientifique de la Fondation de Edmond Rothschild. », HAL, 2019.

 

 

 

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Bibliographie


  • Michel Morange, « L’Institut de biologie physico-chimique de sa fondation à l’entrée dans l’ère moléculaire », La revue pour l’histoire du CNRS, 7 | 2002, OpenEdition.
  • [PDF 81 pages] L’IBPC par ceux qui l’ont fait, dir. N. Chevassus-au-Louis & F.-A. Wolman, mai 2010, PDF.
  • [PDF 21 pages, affiches d’exposition sur les grilles de l’IBPC, à l’occasion des 80 ans du CNRS en 2016] L’IBPC, l’étincelle originelle du CNRS, 2016, PDF.
  • Denise Lévy-Astruc, Histoire officielle, officieuse et marginale de l’Institut de Biologie Physico-Chimique. Fondation Edmond de Rothschild. D'Avril 1927 à Décembre 1958 (livre rare, 1968) (édition numérique réalisée en mai 2020 par François Lapadu-Hargues, petit fils de Pierre Girard, PDF en ligne). 
  • Diane Dosso, Louis Rapkine (1904-1948) et la mobilisation scientifique de la France libre. Thèse de doctorat d'Histoire, Université Paris VII-Denis Diderot, 1998 (dir. D. Pestre)
  • Diane Dosso, "Le plan de sauvetage des scientifiques français", Revue de Synthèse, Springer Verlag/Lavoisier, 2006, 127 (2), pp.429-451
  • Diane Dosso, 5. La Seconde Guerre mondiale et l'exil des scientifiques aux États-Unis, L'argent de l'influence, Autrement, pp.105-124, 2010
  • Edouard Launet, Sorbonne Plage, éd. Stock, 2016
  • Vidéo cultureGnum, Denis Guthleben (CNRS), La création des institutions scientifiques françaises (2017).
  • Hervé Le Ferrand, « Une présence dijonnaise aux origines du CNRS ? Paul Appell et André Job membres du Comité scientifique de la Fondation de Edmond Rothschild. », HAL, 2019.


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