Le corps dans le cinéma d'action étatsunien à l'ère du numérique

Force est de constater que, depuis le milieu des années 2010, les séries et le cinéma d’action étatsuniens portent une attention renouvelée au corps profilmique, et ceci alors même que le contexte industriel dominé par les technologies numériques a consacré l’hégémonie d’autres genres d’aventure centrés des corps virtuels. Le succès de la franchise John Wick (2014 ; 2017 ; 2019 ; 2023) en est une manifestation, qui a transformé le paysage du cinéma d’action contemporain en inspirant une série de productions renouant avec les coordonnées physiques du cinéma d’action classique. Ces productions dépendent entièrement de l’imagerie numérique dans leur esthétique et la mise-en-scène de leurs séquences d’action, amenant à penser l’articulation entre profilmique et numérique sur le mode de l’hybridation plutôt que de l’opposition. Mais elles reflètent peut-être aussi la réaffirmation de la matérialité du corps profilmique comme principe privilégié de l’action à l’écran. 

Ce séminaire est une séance de préparation au colloque sur « Le corps dans les séries et le cinéma d’action étatsuniens à l’ère du numérique » co-organisé avec Claire Cornillon et le laboratoire RIRRA 21 les 6 et 7 mars 2025 à l’université de Montpellier Paul-Valéry. Mon intervention se propose de dresser un panorama des enjeux scientifiques entourant le genre d’action dans sa relation au corps et dans un contexte d’ubiquité du numérique. En me concentrant essentiellement sur le cas du cinéma et l’analyse de quelques séquences, je retracerai d’abord les diverses approches du genre d’action dans la littérature scientifique et la place qu’elles donnent aux représentations du corps en action. J’aborderai ensuite la question de l’émergence du numérique et la tension que celle-ci exacerbe entre deux conceptions concurrentes du cinéma que sont le réalisme et l’illusion. Je terminerai par la présentation de ce qui constitue la particularité d’une tendance du cinéma d’action contemporain, qui est pour moi le cœur des enjeux du colloque, à savoir le co-développement d’une matérialité exacerbée du corps en action (réalisme) et d’une fictionnalité assumée de l’univers de l’action (illusion).