Vidéo pédagogique
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Notice
Lieu de réalisation
Mémorial de la Shoah, Paris IVe, et FMSH, Paris VIe.
Langue :
Français
Crédits
Alexandre MOATTI (Publication), Quentin CENSIER (Réalisation), Jean-Luc Pinol (Intervention)
Conditions d'utilisation
Creative Commons-BY-NC-ND auteur CultureGnum - 2019
DOI : 10.60527/gxta-vk08
Citer cette ressource :
Jean-Luc Pinol. cultureGnum. (2019, 11 février). Une approche spatiale de la déportation des Juifs de France. [Vidéo]. Canal-U. https://doi.org/10.60527/gxta-vk08. (Consultée le 19 mars 2024)

Une approche spatiale de la déportation des Juifs de France

Réalisation : 11 février 2019 - Mise en ligne : 6 septembre 2019
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Descriptif

par Jean-Luc Pinol, professeur émérite d'histoire à l'ENS Lyon, sur la base de ses travaux et de son établissement de plusieurs sites d'information géographique.

Jean-Luc Pinol nous fait partager ce sujet de recherche sur lequel il a beaucoup travaillé, notamment à partir des données de la déportation des Juifs de France assemblées par Serge Klarsfeld (Mémorial de la Déportation des Juifs de France, cf. bibliographie) – et en coopération avec ce dernier.

La vidéo a été tournée en deux endroits, principalement à la FMSH, à l'exception du prologue (mise en contexte) et de la partie consacrée à Raoul Swiecznik, tournés au Mémorial de la Shoah (que nous remercions pour cette prise de vues). Au Mémorial, le prologue est tourné dans la salle des photographies du 'Mémorial des enfants' ; la partie Swiecznik est tournée dans la salle du "fichier des Juifs de la Seine". La partie tournée à la FMSH (partie la plus importante en durée) est un exposé didactique (avec slides), que nous résumons ci-dessous.

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Quelques chiffres d’abord : ces « données Klarsfeld » recensent 78 000Juifs déportés depuis la France, auxquels il faut ajouter 2500 Juifs morts dans les camps français, et 1250 Juifs massacrés dans les exactions de 1944(Dordogne, Lyon).

En ce qui concerne les Juifs étrangers (« réfugiés » en France), les données d’analyse géographique font apparaître de nombreux décès, ainsi de Juifs allemands au camp de Gurs (Pyrénées-Atlantiques) pendant l’hiver 1940-1941. Les« Juifs étrangers » réfugiés en « zone libre » avaient été enfermés par Vichy dans les divers camps français dès l’automne 1940 : Gurs (près de Pau), Récébédou et Noé (près de Toulouse), Le Vernet (Ariège),Rivesaltes (près de Perpignan), Aix-les-Milles (près de Marseille).

Les données contribuent aussi à une meilleure connaissance chronologique de la composition des convois de déportation (environ 80, composés chacun d’un millier de personnes environ, partant de leur grande majorité de Drancy, parfois via le camp de Royallieu à Compiègne – les Juifs étaient généralement transférés dans un de ces deux camps).

Les 16 premiers convois, du 27 mars 1942 (convoi n°1) à début août 1942, marquent une forte surreprésentation des Juifs polonais ; pour les convois 1 à 7, de Juifs polonais résidant à Paris ou en zone occupée. Le convoi n°8 (814déportés, dont 118 enfants) marque une particularité : il part d’Angers, avec de forts effectifs de Juifs résidant dans les départements de l’Ouest, en zone occupée, Juifs étrangers et même déjà Juifs français, en violation des conventions d’armistice. Le convoi n°18 du 12 août 1942 (1007 déportés) est exclusivement composé de Juifs allemands des camps du Sud de la France.

Les convois n°20 à 25, du 17 au 28 août 1942, marquent une surreprésentation très forte des Juifs parisiens (Juifs français), à la suite de la « Rafle du Vel d’Hiv » des 16 et 17 juillet 1942 (p.ex. le convoi n°22 comporte993 personnes dont 605 enfants ; entre 300 et 600 enfants dans chacun de ces convois).

Les convois n°26 à 33 (du 2 au 16 septembre 1942) marquent une forte représentation des Juifs allemands, à la suite de la rafle du 26 août 1942 organisée par Vichy en zone « libre », se traduisant par l’arrestation et la déportation de 6600 Juifs étrangers (ainsi, par exemple, le convoi n°30avec de nombreux Juifs du Lot-et-Garonne).

Les rafles et convois continuent bien sûr après l’invasion de la zone Sud en novembre1942. Ainsi, par exemple, de la rafle des 22-24 janvier1943 à Marseille, organisée conjointement par Vichy et les Allemands (Oberg), pour « nettoyer » le quartier du Vieux-Port. Y compris après le Débarquement en Normandie, on compte encore plusieurs convois (n° 76 à 82, du 30 juin au 20 août 1944).

L’année 1944 se traduit pas une politique de traque plus expéditive encore, par les Allemands comme par la Milice. Peu connus, de véritables massacres ont eu lieu : massacres perpétrés par la division Brehmer en Dordogne fin mars 1944 (345 p., civils juifs et non-juifs), massacres organisés par Klaus Barbie à Lyon, mai-juillet 1944, tragédie des puits de Guerry (Cher, juillet 1944 – 36 victimes juives pour la plupart jetées vivantes dans des puits).

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Les données spatiales permettent aussi de recouper, grâce aux adresses des déportés, les arrondissements les plus touchés à Paris (3e, 4e, 11e, 20e), et notamment, avec une forte densité d’arrestations, les « quartiers insalubres » tels que recensés avant-guerre.

A ce sujet, J.-L. Pinol revient sur le travail de recherche et d’écriture qu’avait fait Georges Perec (1936-1982) à propos d’une rue d’un de ces quartiers où il avait passé son enfance, la rue Vilin (11e arrdt), aujourd’hui disparue (sous le parc de Belleville). Son père, Juif polonais, est engagé volontaire dans l’Armée française pendant la guerre de 1939-40, mortellement blessé le 16 juin1940 ; sa mère Cyrla, qui tenait un salon de coiffure au 24 rue Vilin, est déportée à Auschwitz (convoi n°47 du 11 février 1943), d'où elle ne revint pas.

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J.-L.Pinol termine son intervention en évoquant la question méthodologique des « humanités spatiales », manière de faire de l’histoire à rattacher aux « humanités numériques ».

 

(Résumé de l'intervention vidéo cultureGnum de Jean-Luc Pinol et bibliographie ci-dessous réalisés par Alexandre Moatti, août 2019)

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Voir les pages Wikipédia bien détaillées sur :

  • Les convois de la déportation des Juifs de France (page)
  • La rafle du Vélodrome d'Hiver, 16 & 17 juillet 1942, Paris (page)
  • La rafle du 26 août 1942 organisée par Vichy en zone Libre, arrestation et déportation de 6 600 Juifs étrangers (page)
  • La rafle de Marseille des 22-24 janvier 1943, organisée par les Allemands au Vieux-Port avec le soutien de la police de Vichy (page)
  • Les massacres de la Division Brehmer en Dordogne, mars-avril 1944 (page)
  • La Tragédie des Puits de Guerry (26 juillet 1944) (page)
  • Les« Quartiers insalubres » parisiens (page)
  • L'affaire du Fichier des juifs parisiens (page)

 

Bibliographie :

  • Serge & Beate Klarsfeld, Mémorial de la Déportation des Juifs de France, 1978 (nvelle édition FFDJF, 2012) [recensement des noms, prénoms, noms de jeune fille, âge, date et lieu de naissance, adresses, villes, camps de rassemblement des 74 182 Juifs déportés de France]
  • Jean-Luc Pinol, Convois, La déportation des Juifs de France, éditions du Détour, 2019 (préface de S. Klarsfeld)
  • Georges Perec, W ou le Souvenir d'enfance, Denoël, 1975 (L’Imaginaire, Gallimard, 1993)
  • Film documentaire de Robert Bober, 1992, En remontant la rue Vilin, sur la base du texte de G. Perec (vidéo 48 mn)

 

Atlas des cartes correspondantes :

  • Site général ‘Territoires et Trajectoires de la Déportation des Juifs de France’(CNRS-ENS Lyon-S. Klarsfeld) (site hébergé par HumaNum)
  • Dont :cartographie des enfants juifs déportés depuis la France de juillet 1942 à août 1944 (lien)

 

 

Intervention

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