Langue sage et langue folle : sur un mythe
contemporain
du rapport Latin/Roman au Moyen Age.
Banniard Michel,
Directeur d’Etudes à l’EPHE-Paris
Pré-texte
1] Sur un
dualisme…contemporain
Dans
la communauté des spécialistes de la littérature médiévale, une idée est
répandue comme un locus communis, l’existence
prégnante d’un rapport diglossique entre le latin et le roman au MA. Sous ce
terme qui a fait florès, les chercheurs ont placé des quantités de situations
qui n’ont souvent que peu de rapport avec une situation correspondant au type
nommé. Dans le cas particulier du rapport entretenu au niveau des
représentations et des mentalités dans le monde des lettrés médiévaux, en
schématisant un peu, le critère essentiel à l’œuvre dans les descriptions contemporaines
(j’entends par là depuis le 20e siècle)est le suivant : le
latin, « langue sage » est constamment en position dominante par
rapport au roman, « langue folle ».
L’abondance de la bibliographie en atteste : le modèle est
présent partout, au moins en
arrière-plan, chez les latinistes, les romanistes, les historiens de la
culture, et les historiens de la littérature.
Un
avatar récent de ce modèle figure dans la présentation du sponsus lui-même dans le papier d’annonce, dont l’orientation doit
sûrement quelque chose aux travaux d’ Y. Cazal. Après bien d’autres, Y. Cazal
s’interroge doctement sur une répartition hiérarchisée de l’emploi du latin et
du roman en insistant sur la subordination du second par rapport au premier sur
des critères de valeur culturelle et religieuse. Son étude porte sur un
ensemble de monuments qui, effectivement, mettent en œuvre les deux langues,
les pages consacrées au Sponsus
s’intégrant dans une enquête plus vaste, tout en s’appuyant longuement sur ce
dernier pour donner leur point d’orgue à ses thèses.
La
position de cette communication est la suivante : la distinction
fonctionnelle de type diglossique est dépourvue de sens autrement que dans
l’imagination des chercheurs contemporains influencés par le topos qui présente
l’avantage d’orner les travaux contemporains d’un paramétrage apparemment
scientifique, donc confortable. La proposition avancée ici, comme dans d’autres
communications, et en cohérence avec d’autres chercheurs qui se sont hasardés
hors des sentiers battus, est de déconstruire le modèle usuel, statique (domination diglossique), au profit d’un
modèle innovant, dynamique (conquête d’un
acrolecte).
2] Clercs du
Moyen Age et d’aujourd’hui
Un
bref rappel épistémologique est indispensable à la clarté de cette
communication. En effet, cette remise en cause fait suite aux effets indirects
d’une longue enquête en linguistique
diachronique sur les modalités et la chronologie du passage du latin
roman. Ses résultats ont abouti à une remise en cause partielle des outils mis
en œuvre dans cette discipline.
1)
La première déconstruction touche les termes mêmes dans
lesquels s’exprime depuis le 19e siècle la linguistique diachronique en tant que telle, parce que
c’est là que se débusque le premier dualisme, bien à l’œuvre dans le modèle
mental traditionnel des philologues et des linguistes. Ils opposent en effet
deux langues :
D’un côté le latin littéraire : « langue
sage » : structurée, savante, ordonnée, immuable, fiable, sacrée [grammatica/ littera/ doctrina…]
De l’autre le latin vulgaire : « langue
folle » : amorphe, ignare, désordonnée, mutante, infidèle, profane [rusticitas/illiterata/rudis…].
En conséquence, cette prétendue description s’est
transformée en prescription bien réelle à deux niveaux :
a)
La genèse des langues romanes (même sous la plume de
linguistes à la pensée sophistiquée) répond essentiellement au principe de la
« pathogénèse » [Entropie].
b)
Par voie de conséquence, le le MA hérite de ce modèle
avec l’attribution au rapport entre roman et latin du principe de
« diglossie » [Soumission].
En d’autres termes, le roman vient prendre la place du latin vulgaire en
tant que « langue folle », tandis que le latin, désormais privé
d’adjectif, puisqu’il est « la lettre » par définition (scire litteras), est érigé en bloc au
rang de « langue sage ».
Ainsi l’artefact langagier est entièrement
construit, avec une évidente conséquence dans la nomination, le latin
« vulgaire » conduit en ligne directe aux langues
« vulgaires ».
Prendre
conscience de ces artefacts a été compliqué et la révision de nos modes de
recherche et d’enseignement requiert là aussi une conquête intellectuelle,
autrement dit un renoncement au confort. Le petit tableau qui complète votre
document signe l’ampleur des modifications : il a existé une latinophonie
qui a vécu et évolué comme toute langue vivante jusqu’à sa métamorphose en un
nouveau type de cette langue : l’espèce «latin » n’a pas disparu,
c’est le type qui a muté. Tout jugement de type « moral » trahit la
linguistique (objective) au profit de l’éthique (subjective). Ceux qui ont
fréquenté les atlas linguistiques, les dialectologues, les ethnographes et en
général les études d’histoire culturelle savent combien ce modèle dualiste a
sévi et sévit encore sous la forme d’un mépris des « patois »,
« langues folles » par rapport au français, « langue
sage ». Au 19e siècle, en effet, c’est au tour du
« français » de prendre la place du « latin » et aux
dialectes, notamment occitans, de prendre la place du « vulgaire ».
Tout ceci conduit à une évidence :
dans certains domaines « sensibles » (où en fait dominent les
rapports de pouvoir), les noms ne sont pas innocents, mais au contraire signent
un rapport de pouvoir qui entraîne la mise en place d’une échelle de valeurs.
Or, nous sommes habitués au maniement de noms qui sont familiers aux
médiévistes, « langues vulgaires, langues vernaculaires » : ces
dénominations sont censées renvoyer aux langues non latines, autrement dit
maternelles ou « naturelles », en l’occurrence les langues romanes et
les langues germaniques, essentiellement pour l’Europe. Mais nous ne prêtons
plus attention au fait que ces noms remontent à un patrimoine intellectuel
médiéval totalement marqué par un dualisme clérical : ce sont en effet
exclusivement les auteurs latins du Moyen Age qui emploient cette terminologie,
les auteurs romans ne l’employant jamais, du moins dans la plus ancienne poésie
d’oc ou d’oïl. Au contraire, ils désignent leur propre langue en termes à la
fois précis et neutres, c’est-à-dire valorisant par rapport aux désignations
employées par les clercs, leurs contemporains. A l’intention de ces rivaux
implicites, auxquels ils s’adressent souvent, les poètes romanophones
construisent de véritables plaidoyers en faveur des langues modernes, voire
esquissent des arts poétiques, le tout ayant
pour cible les nouvelles élites
laïques féodales.
Cela signifie que les chercheurs
d’aujourd’hui en employant cette terminologie reproduisent le modèle clérical
du MA, avec toutes les intrications mentales qu’invoque, consciemment ou non,
un tel choix. Cette absence de métalangage passe d’autant plus inaperçue que le
vocabulaire clérical s’est en fait parfaitement accordé aux modèles mentaux qui
ont présidé à la naissance de la philologie romane.
3] Parite langagiere
Tant
ces dénominations que la modélisation devraient être aujourd’hui écartées,
parce qu’elles ne répondent pas à l’objectivité scientifique. De plus cet
héritage mental a brouillé durablement les cartes, cette défaillance étant
particulièrement nette dans le cas d’œuvres où les deux langues, latine et
romane, sont directement associées au sein d’une même œuvre, comme le Sponsus.
En effet, mais je serai très
bref là-dessus ici, la répartition binaire dualiste a empêché les linguistes de
décrire la langue écrite du Haut Moyen Age, puis du Moyen Age féodal, en tenant
soigneusement compte de ce fait, bien avéré, pouvant se résumer en deux
formules :
Il n’existe pas UN latin, mais des latins, certains
étant en fait du roman latiniforme (latinitas
minor) – ce qui signifie en particulier que les fameux premiers monuments
romans des 9e et 10e siècles n’ont qu’un caractère très
partiel de primauté.
Il n’existe pas UN roman, mais des romans, certains
étant en fait des acrolectes très savants (romanitas
maior), qui sont présents dès le début tant en domaine occitanophone qu’en
domaine oïlophone.
En document annexe, le tableau décrivant les
niveaux de langue en latin carolingien écrit a une double fonction :
donner à voir directement le résultat d’une archéologie linguistique qui a mis
à jour des couches langagières ; ouvrir sur la possibilité d’une
application aux textes de latin médiéval, précisément ici au Sponsus.
Le résultat global de ces considérations est
obvie : le modèle diglossique opposant latin et roman est tout simplement
faux, même au niveau de l’analyse des monuments littéraires, ce qui nous
conduit directement à invalider les présentations récentes du Sponsus parce que le roman n’y est
nullement la « langue folle », le latin nullement la « langue
sage », ce qui par ricochet interdit tout étiquetage de type exégétique ou
pire par « gender categorizing ».
L’argumentation
sera simple dans la mesure où il s’agit de prendre à contre-pied les
contorsions incertaines imposées par le modèle usuel pour appliquer directement
les principes du contre-modèle qui vient d’être proposé. Pour ne pas trop
alourdir la démonstration, je me bornerai à débusquer d’abord quelques
fluctuations de niveau dans les parties latines, qui conduisent à y débusquer,
à côté de séquences en sermo altus,
des séquences en sermo humilis, qui relevant à l’évidence du niveau 2, sont en
fait justiciables de la qualification « para-roman » ;
inversement, on verra que l’occitan fluctue également, avec, à sa manière des
zones de sermo humilis, mais aussi
des pics en structures tendues, se plaçant du côté du sermo altus.
Soit donc d’abord une
reconsidération du latin, ou plutôt de ce qui est graphiquement désigné comme
« latin ». Cette part du texte est fréquemment de niveau 2, para-roman, en suivant le
classement proposé en annexe.
*VI, 28-30 (Fatuae) :
Nos virgines
que ad vos venimus/ negligenter oleum fudimus ; /ad vos orare sorores
cupimus…
« Nous les jeunes filles qui venons vers vous,
nous avons épuisé l’huile par manque d’attention ; c’est à vous que nous
désirons adresser notre prière… ».
La morphologie sans opacité est transposable directement en roman (c’est
une affaire de cohérence graphie/ phonie). Relevons le cas remarquable de ad vos
(Datif/ Accusatif prépositionnel/ CRIP+).
La syntaxe est linéaire et progressive.
Le vocabulaire est pan-roman, même l’adverbe en –ter n’est pas impossible au 11e
siècle (cf. noctanter > nuitantre en
oïl).
*XI, 53-55 (F.) :
A !
misere, nos hoc quid facimus ?/ Vigilare numquid potuimus ?/
Hunc laborem quem nunc perferimus, /nobis nosmed contulimus…
« Ah ! Misérables, que faisons-nous ici, nous
? Oui, vraiment, étions-nous capables de rester éveillées ? Cette épreuve
qu’à présent nous endurons, c’est nous-mêmes qui nous la sommes
imposée… ».
Mêmes remarques. Notons nosmed, « nous-mêmes ».
Deux archaïsmes, nobis et numquid. Le
premier peut renvoyer à un CRIP-, fréquent en AFC et en AOC ; le second
recouvre peut-être quelque forme limousine et reste de toute façon
intelligible dans le flux intonatoire.
*XVI, 75 (F.):
A! misere nos
ad quid venimus ?
« Ah ! Misérables, dans quel but arrivons-nous
? »
Transposition directe en roman sans difficulté.
78
Ad nuptias
nunquam intrabimus…
« Jamais nous n’entrerons pour les
noces… »
Même remarque. Futur peu gênant, croisement oral
avec le passé simple.
*XVII,
81-82 (F.):
Aperire fac nobis ostium cum sotiis;
prebe remedium !
« Fais nous ouvrir l’huis en même temps qu’à
nos associées ; offre nous le remède… »
Ordre des mots un peu « jambe en l’air »
(mais voyez celui de la poésie d’oc ou d’oïl médiévale et celle du français
parlé spontané…
Avalle se complique un peu la vie (ceci dit
respectueusement), p. 77, note 82, où il impute à cum le sens de « comme ». Mais si c’était le cas, il
faudrait lire qom, issu de quomodo, bien attesté en LPT et en
roman. Mais il est bien plus simple d’y voir le sens premier
« avec », au sens de « en compagnie de », l’idée étant
« laisse nous passer en même temps que les cinq autres ».
L’erreur provient de l’idée que la forme locale apud/ apud hoc/ ab/ ab hoc/ (bien attestée en latin mérovingien) avait
évincé depuis longtemps l’ancienne forme cum.
Mais nous savons aujourd’hui qu’il y a eu une longue période de polymorphisme
dont cette occurrence, tout à fait possible au 11e siècle est la
preuve, même si alors c’était une forme marquée.
Si nous étudions le roman, il
est de même niveau, voire de niveau supérieur.
Je n’entre pas dans le débat sur la localisation de
ce roman, ce qui est un autre sujet. La langue que j’y lis me renvoie assez
familièrement au limousin (parlers occitans de Nontron-Chalus-Confolens), et
d’autre part les convergences avec l’histoire littéraire de cet espace sont
très fortes, à commencer par la floraison des tropes et des séquences sous l’égide de l’abbaye de
saint Martial, sans compter que cette production est contemporaine du premier
troubadour dont nous ayons les textes. La présence d’éventuels oïlismes, due
peut-être aux avatars de la circulation du texte et des copies, n’invalide pas
cette conclusion.
Ce sont les vierges « sages » à qui la
parole romane est attribuée de façon majoritaire (les vierges folles ne
s’expriment en roman que dans le refrain).
Leur niveau de langue est majoritairement le même
que celui du latin des vierges folles.
La forme des vers contraint évidemment la syntaxe
et le phrasé. Elles se caractérisent par la compacité et la densité des moyens
d’information : l’implicite y déborde largement l’explicite. Pour réaliser
ce point, il faut se déprendre de notre bagage culturel pour mesurer l’englobement
extrême du texte dans un savoir complexe (après tout, c’est le propre des
paraboles !).
Mais en plus il arrive que la syntaxe se
tende :
*II, 12 (Prudentes) :
Eiset presen
que vos comandarum !
« Sortez sur-le-champ à notre ordre… »
La subordonnée temporelle est introduite par un
connecteur compact : presen que,
qui a nécessité une note longue explicative de l’éditeur (p. 72, n. 12) avec
les sens de « aussitôt que », d’où la traduction.
*XIX, 69-70 (Mercatores
):
Cosel queret,
no.u vos poem doner;/ queret lo Deu chi vos pot coseler.
« Vous demandez du soutiens, nous ne pouvons
pas vous le donner ; demandez le à Dieu qui, lui, peut vous le
donner ».
Enonciation tendue et antithétique, avec en prime
la construction avec un CRIP- Deu qui
complète l’installation de cette langue au rang d’acrolecte littéraire.
L’emploi de cosel
renvoie évidemment au latin consilium,
cette terminologie relevant du serment féodal : dans le programme
d’entraide réciproque, il est prévu que soit garanti le « conseil »,
avec toutes les implications du terme : aviser d’une erreur ou proposer
une solution. C’est cette deuxième implication qui est invoquée ici, confirmant
si besoin était le cadre féodal de cette promotion de l’occitan.
*XV, 72-73 (Mercatores):
E preiat las
per Deu lo glorios/ de oleo fasen secors a vos.
« Et priez-les, au nom du Dieu de Gloire,
qu’elles vous apportent le secours de leur huile ».
Compacité de l’énoncé renforcé par la construction
directe de la subordonnée complétive, dans la plus pure tradition du latin littéraire,
antique ou médiéval, et à l’image des structures fréquentes dans le plus ancien
français ou occitan littéraires.
L’occasion est trop belle de procéder à une
rétroversion :
Et precatis
illas per Deum illum gloriosum/ de
oleo faciant auxilium ad vos
Ou en latin plus conservateur :
Et illas
precamini pro Deo illo glorioso/ de aleo vobis auxilium ferant, etc…
Ce petit exercice n’a pas d’autre but que de monter
que le roman et le latin de ce texte fonctionnent comme un code unique
d’acrolecte littéraire.
XIX, 86 (Christus
)
Le Christ, dernier intervenant, s’exprime d’abord
en latin de niveau 4, puis passe à un occitan, lui aussi de niveau élevé, comme
en témoigne la structure du vers 86.
A tot jorns
mais vos so penas liureas
« C’est pour toujours que vous
êtes livrées aux châtiments… »
Il est clairement traduit pas l’éditeur, mais sans
explications grammaticales. Pourtant la construction de penas liureas ne va pas de soi. Non seulement le PPP est précédé
par son complément de but, mais en plus celui-ci est construit en CRIP-, bloc
particulièrement archaïque, puisqu’il est la mémoire du latin mérovingien
(ancien datif de but).
4] Conquete
en cours
Je
terminerai par une citation directe de conclusions qui ont eu un certain succès
après la publication de l’ouvrage : « La langue romane, quand elle
est la langue du refrain, figure dans le drame au titre d’une langue éloignée,
au double sens du mot : c’est d’abord une langue lointaine pour le drame
latin qui l’accueille, langue de l’enfance, de l’autre – la mère, la femme, le
laïc, celui qui est dans l’erreur… [Cazal, 1998, p. 253-254] ». Comme ces
lignes ont été écrites en s’appuyant en particulier sur le sponsus, il est justifié d’y répondre. Elles sont bien enlevées, et
à ce titre sollicitent l’adhésion du lecteur, précisément séduit par cette
allégresse intellectuelle (delectare !),
si facilement induite par le jeu des antithèses ; elles vont dans le sens
d’un certain courant idéologique « moderne dans le vent » ;
elles entérinent le topos exposé plus
haut.
Mais
ces trois raisons ne résistent pas à une analyse sérieuse de ce document. Il
est impossible de déterminer quelque polarisation que ce soit entre le latin et
le roman dans ce document. Au point de vue des rôles, latin et roman
s’entremêlent sans distinction (le Christ s’exprime en latin puis en roman). Au
point de vue des niveaux de langue, entre des passages en latinitas minor et des passages en romanitas maior, seul un préjugé tenace (même chez les chercheurs
modernes) autorise une répartition dualiste (« langue sage, littera » // « langue folle, vulgaris »). Je souligne à ce
propos comme l’emploi sans guillemets de distanciation du terme
« farciture » pour désigner ces textes contribue à fausser la
perspective : le mot, évidemment d’origine cléricale, stigmatise une dissonance qui n’est présente que dans
l’imaginaire du clerc latiniste qui l’a introduit.
En
définitive, ce monument est justiciable d’une interprétation en deux
temps : oui, l’émergence du roman au cœur du latin dans un texte fortement
pragmatique, nous frappe, comme elle a dû frapper les auditeurs et les
participants de ce temps. Mais non, elle n’a pas été vécue comme une anomalie,
ou une dissonance, mais bien plutôt comme la mise en place d’une nouvelle
normalité ou une nouvelle consonance, où le latin et le roman sont devenus
pairs. Evidemment cela signifie une conquête : il ne s’agit pas de plaire
à la masse occitanophone (bien qu’elle ait pu y trouver son compte), mais
d’installer un acrolecte littéraire roman, effet et signe de l’ascenscion des
élites féodales, bien décidées à disposer de leur miroir.
Fornex
31 10 2012 Explicit feliciter.
Bibliographie
« Autour du Sponsus »
Avalle d'Arco
Silvio, Monterosso
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Banniard M., 1992, Viva voce. Communication écrite et
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auliques : niveaux de latinité et niveaux de réception à la fin du VIIIe
siècle., in J. Jarnut (éd.), Am
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communication latinophone, in Settimana LII : Communicare e significare
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lyriques d'oc, in Fasseur V. (éd.), L’Aquitaine des littératures médiévales, Paris, p. 59-75.
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langage en lyrique d'oc, in Fasseur V., Valette J.R. (éd.), Ecoles de pensée et littérature d'oc et
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Thomas L.P., 1951, Le
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Wright
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Carolingian France, Liverpool.
Terminologie
LPC : Latin Parlé
d'époque Classique [-200 / + 200]
LPT : Latin Parlé Tardif
[IIIe-VIIe siècle]
LPT1 : LPT de phase 1
[IIIe-Ve siècle] (LPT «impérial»)
LPT2 : LPT de phase 2
[VIe-VIIe s.] (LPT «mérovingien» en Gaule ;
«wisigothique» en Espagne ; «lombard» en Italie).
PF : Protofrançais (VIIIe
s.).
AFC : Ancien Français
Classique (IXe-XIIIe s.).
AFT : Ancien Français
Tardif (XIVe-XVe s.).
PO : Protooccitan (8e s.)
AOC : Ancien Occitan Classique (10e-13e
s.)
Niveaux de
langue en latin carolingien (zone d’oïl).
I] Protofrançais direct : commandements à
l'intérieur du palais adressés aux domestiques, esclaves, etc.... Oralité
immédiate en accent local. Evidemment, sous le terme protofrançais, on
comprendra toutes les variétés dialectales dont les contours sont en voie
d'émergence (lorrain, champenois, wallon...).
II] Latin à phrasé protofrançais saupoudré
de quelques latinismes aléatoires : commandements lors de cérémonies
solennelles collectives, rapports oraux de missions sur l'état d'abbayes, de
corps d'armée, certains polyptiques, etc.... Oralité démarquée en diction plus
soignée, mais en accent également roman.
III] Latin à phrasé protofrançais combiné
à des séquences plus franchement latines, sorte de lingua mixta :
rapports écrits de mission des missi dominici ; capitulaires, notamment
le de uillis ; serments. Réalisation orale éventuelle en diction
latinisante.
IV] Latin en stylus simplex
comprenant des séquences de protofrançais mieux masqué : préambules des
capitulaires ; corps des lettres dans les correspondances ; traités
particuliers d'éducation. Réalisation orale éventuelle en restaurant la
syllabation complète.
V] Latin en sermo altus ne
comprenant plus que des séquences brèves de type roman : Vies de saints
récrites ; traités de théologie et de controverse doctrinale (Libri carolini)
; poésies soit de forme classique, soit rythmiques. Dans le cas de lecture à
haute voix, l'oralité cherche à restaurer l'intégralité des syllabes écrites.
Avalle d'Arco
Silvio, Monterosso
R., 1965, Sponsus. Drama delle
vergini prudenti e delle vergini stolte. Testo letterario a cura di D’A.S.
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communication latinophone, in Settimana LII : Communicare e significare
nell'alto medioevo, Spolète, p. 155-208.
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carolingiennes : du latin quotidien au latin d’apparat, in Bougard F. (éd.), La culture du Haut
Moyen Age, une question d’élites ?,
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la poésie savante au XIe siècle : entre tropes latins et tropes
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langage en lyrique d'oc, in Fasseur V., Valette J.R. (éd.), Ecoles de pensée et littérature d'oc et
d'oïl (Pau, Mars 2011), à paraître.
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esclaves peut-elle parler de Dieu ? La langue occitane à la conquête de son
acrolecte religieux, in Cahiers de Fanjeaux, t. 46, sous presse.
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8e siècle latiniforme de rythme romano-germanique, in Formarier
M., Schmitt J.Cl. (éd.), Colloque EHESS-Paris, Juin 2012, Rythmes et
croyances au Moyen Age, à paraître.
Grévin B. (éd.), 2005, La résistible ascension des vulgaires.
Contacts entre latin et langues vulgaires au bas Moyen Age. Problèmes pour l'historien, in MEFR, MA, t. 117/2.
Cazal Y., 1998, Les voix du peuple. Verbum Die.
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Stotz P., 2011, Research on Early
Medieval Rythmical Poetry. Some Results and some Problems, in Ars edendi Lectures Series 1, vol. 1, p. 81-111.
Thomas L.P., 1951, Le
« Sponsus » (Mystère des
Vierges sages et des Vierges folles) suivi de trois poèmes limousins et farcis
du même manuscrit. Etude critique, textes, musique, notes et glossaire, Paris.
Wright
R., 1982, Late Latin and Early Romance in Spain and
Carolingian France, Liverpool.
> Voir aussi la bibliographie générale dans l'onglet "Documents".
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