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Langue :
Français
Crédits
Mission 2000 en France (Production), UTLS - la suite (Réalisation), Emile Pefferkorn (Intervention)
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Droit commun de la propriété intellectuelle
DOI : 10.60527/9ph0-bb70
Citer cette ressource :
Emile Pefferkorn. UTLS. (2000, 16 octobre). La pollution des sols , in Les pollutions et leurs remèdes. [Vidéo]. Canal-U. https://doi.org/10.60527/9ph0-bb70. (Consultée le 19 mars 2024)

La pollution des sols

Réalisation : 16 octobre 2000 - Mise en ligne : 16 octobre 2000
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Descriptif

Le problème des sols pollués ne fait pas recette auprès du grand public car les origines de la pollution peuvent être diverses et ne présenter qu'un impact peu perceptible sur la santé. En raison de leur importance dans la production de nourriture et de végétation, nous mettrons l'accent sur la pollution des sols agricoles et corrélerons entre structure et fertilité des sols. Pour illustrer le propos, nous présenterons l'impact de l'acidification d'un milieu complexe, constitué de poudre d'alumine ou d'argile et de substances organiques naturelles, sur la modification de la structure des systèmes et en donnerons une interprétation basée sur les phénomènes responsables du transfert d'ions au sein de la couche organique en surface de l'oxyde ou de l'argile. Nous décrirons les mécanismes responsables de la dispersion des agrégats en milieu acide. L'examen des deux systèmes permettra de rendre compte de la difficulté qu'il y a à restructurer des systèmes simples pollués. On pourra imaginer la difficulté qu'il y aura à donner vie et fertilité à un sol pollué dans la mesure où la nature physico-chimique des sols est extrêmement complexe. Enfin, nous donnerons un exemple où l'ajout de matières organiques à l'eau d'irrigation renforce la cohésion des sols.

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Texte de la 290e conférence de l'Université de tous les savoirs donnée le 16 octobre 2000

La pollution des sols

par Émile Pefferkorn

Des idées neuves sur la nature et l'origine des sols n'ont émergé que dans la seconde moitié du XIXe siècle. Graduellement, les effets topographiques et biologiques ont été reconnus comme étant des facteurs importants de l'évolution des sols. Un siècle plus tard a été reconnue l'importance des sols en tant que support de vie pour la production de nourritures et de fibres. En fait, les sols grouillent de vie. Par exemple la streptomycine a été isolée du sol et la préservation de la biodiversité et pédodiversité des sols peut aider des recherches similaires dans le futur. On en est cependant pas encore là. Parue en1992, l'histoire des sciences de l'environnement ne mentionnait pas les sciences du sol comme étant une branche des sciences de l'environnement alors que d'autres sciences de la Terre étaient citées. Ce désintérêt et, partant, la méconnaissance de la diversité des sols, de leur rôle et de leur évolution dans le temps ne favorisent certainement pas une prise en compte des effets globaux liés à la pollution de l'air, de l'eau et évidemment des sols.

La pollution des sols résulte des conséquences cumulées des diverses activités humaines, agricoles, urbaines et industrielles. Elle est absente des préoccupations du grand public et des médias, contrairement à celles de l'air et de l'eau, car il est difficile de conclure globalement à la gravité de cette forme de pollution vis-à-vis de la santé. Un sondage récent parmi les scientifiques a cependant indiqué que les craintes et les problèmes suscités par les trois types de pollution étaient d'égale ampleur en terme de conséquences sanitaires, environnementales et socio-économiques. Pour illustrer cette dernière rubrique, je renvoie à une publicité d'une grande firme de l'agrochimie, qui affirmait concevoir des plants susceptibles de pousser en sols pollués. C'était reconnaître le problème et promouvoir un type de solution.

Mon propos est d'introduire, dans un premier temps, une représentation élémentaire de la structure d'un sol fertile, qui puisse servir pour comprendre certains problèmes de pollution et surtout mettre en lumière la difficulté qu'il y a à remédier à la pollution des sols. Il faut préciser que le problème est d'actualité en raison de l'épandage contrôlé des boues sur les sols agricoles, envisagé par certains comme une solution pour se débarrasser à faible coût des élément indésirables contenus dans les déchets issus du traitement des eaux urbaines. Plus communément pratiqué est l'épandage des effluents d'élevage qualifiés opportunément de fertilisants.

Le terme de structure est employé ici pour décrire l'organisation du sol en agrégats. Lorsque l'on dégage à la pointe du couteau un volume du matériau sol observé, la plupart du temps ce volume se fragmente naturellement, en agrégats de formes et de tailles diverses. Ces agrégats, résultant de l'assemblage des particules entre elles selon des critères de forme et de particularité chimique, sont poreux et emboîtés les uns dans les autres à différents niveaux.

À l'échelle du micromètre (le millième de millimètre) ou en dessous, les argiles sont agrégées en raison de la présence de matières organiques et de cations multivalents tels que les ions calcium, magnésium et aluminium. Ces agglomérats sont cimentés entre eux ou reliés à des constituants plus gros comme les minéraux argileux, de fer, de calcaire et de silice. L'activité biologique joue un rôle important à ce niveau. L'ensemble peut avoir des consistances diverses et atteindre des dimensions de l'ordre du décimètre. Précisons tout de suite que si les machines agricoles peuvent labourer la terre et en briser les mottes, leur effet est nul au niveau des micro-agrégats caractérisés par des surfaces spécifiques très élevées, micro-agrégats qui sont responsables de la fertilité des sols. À ce niveau, des effets chimiques (échange d'ions), physiques (dessèchement, cycles de gels et de dégels) et biochimiques (micro-organismes) exercent un effet de remédiation sur des structures effondrées.

Pour schématiser, on peut dire qu'un sol fertile est un sol aéré doué d'une cohésion naturelle qui lui permet de résister à la battance des pluies et aux passages des machines agricoles. Par exemple, le lSss résiste bien à la battance et à l'écrasement dans les conditions assurant une perméabilité hydraulique normale, mais peut s'effondrer en présence de pluies extrêmement fortes, lorsque l'eau réussit à envahir la totalité des cavités. Plus spécifiquement, par des expériences simples de fragmentation contrôlée des agrégats du sol, on a démontré le rôle spécifique de la matière organique du sol. On a déterminé que l'extraction préalable de la matière organique donnait naissance à des agrégats friables, alors que l'extraction préalable de la seule matière inorganique ne modifiait que faiblement la cohésion des systèmes.

Dans un deuxième temps, je présenterai deux schémas de pollution par les ions aluminium susceptible de se produire en sols acides. Pourquoi deux schémas ? En fait pour rendre compte de la diversité des phénomènes physico-chimiques induits sur des sols dont la texture et la composition sont extrêmement complexes. On verra donc d'abord comment se comporte un oxyde d'aluminium (le corindon) sous forme de poudre en suspension dans un milieu faiblement acide (pH 5) et en présence de substances humiques, constituant organique macromoléculaire, responsable de la cohésion des sols. Ensuite, on verra comment se comporte une argile, la kaolinite, dans les mêmes conditions. On retiendra que le premier constituant, sous la forme légèrement différente de gibbsite, peut se retrouver fortement imbriqué avec le second au sein des agrégats du sol. Finalement, je décrirais l'évolution des agglomérats pollués pour évoquer les problèmes multiples posés par la remédiation. Je citerai quelques exemples plus simples où les matériaux polymères utilisés comme additifs lors de l'irrigation exercent un effet préventif.

Structure du sol

Le citadin et le jardinier du week-end éprouvent sans doute la même difficulté à se forger une image de la structure dun sol fertile, accueillant pour les racines des plantes et permettant un transfert aisé des nutriments et autres engrais. Osons lapproche suivante : imaginons que nous disposons dun grand nombre de cubes que nous mettons en suspension dans un milieu liquide ayant la même densité que la matière solide pour éviter les problèmes liés à la sédimentation. Tous ces cubes vont diffuser dans le milieu liquide et se coller entre eux au hasard des collisions pour donner des agrégats de taille et morphologie variées. Lorsque à la fin de lopération, tous les agrégats ne forment plus quun agglomérat unique, que nous sortons du milieu, nous considérerons que cet agglomérat plus ou moins gonflé deau possède la structure dun agglomérat du sol. On peut imaginer que linsertion au sein de lagglomérat dun cube de dimension plus grande en lieu et place dun agrégat de même dimension ne changera pas lordonnancement de lédifice final. Ce mécanisme de formation dagglomérat est connu pour générer des objets fractals. La photographie dune fine tranche prélevée au sein de lagglomérat fournit alors une image très proche de celle obtenue sur lécran du jeu vidéo Tetris par un néophyte. Lempilement des pièces est très mal géré et lensemble est poreux. À linverse, un spécialiste du jeu obtiendra un empilement très compact quasi-exempt de trous. Cette dernière image vaut pour le sol pollué. La pollution correspond donc à un processus qui disperserait lagglomérat en ses constituants initiaux, donnerait naissance à un empilement compact de cubes et générerait une très forte réduction de la surface interfaciale accessible.

Revenons donc au volume poreux ayant la structure d'un agglomérat fractal. Vous savez déjà que la cohésion entre les différents cubes et agrégats résulte de la présence des substances humiques, certes à un taux relativement faible de l'ordre de 4 %. Les acides humiques sont de grosses molécules organiques, les macromolécules. pour fixer un ordre de grandeur, à nombre de molécules égal, le sel de cuisine pèserait environ 50 g, alors que l'acide humique pèserait entre 5 et 7 kilos. Si la matière organique est bien répartie au niveau des jonctions entre les cubes et les agrégats, la cohésion de l'agglomérat est parfaite. Contrairement à la cohésion rigide assurée par les liants inorganiques de faible poids moléculaire, la cohésion assurée par les acides humiques est de nature élastique en raison de la flexibilité du squelette macromoléculaire. En effet, le squelette hydrocarboné de la macromolécule peut être comparé à des chaînes d'arpenteur interconnectées dont certains segments se déploient dans l'espace restant libre entre les cubes et d'autres, en contact avec le matériau solide, assurent la cohésion de l'ensemble. La flexibilité de cette connexion et l'élasticité de la chaîne permettent au système de mieux résister à une pression extérieure et de restaurer partiellement sa structure après compactage. Les mécanismes de fixation des segments au matériau solide sont divers, étant données les diversités des groupes fonctionnels qui composent la macromolécule et des sites actifs en surface du matériau solide. Ils peuvent mettre en jeu des interactions de nature hydrophobe, correspondant à la faculté des microdomaines paraffiniques et aromatiques de la macromolécule de se combiner entre eux et aux sites non polaires du matériau solide. Ils peuvent mettre en jeu des interactions de nature électrique, correspondant à la faculté des systèmes chargés de charges nettes opposées de s'attirer et de se maintenir ensemble. D'autres types de forces peuvent intervenir à des degrés moindres.

Si au contraire la matière organique vient à manquer, un certain nombre de connexions seront faiblement adhésives et il convient alors d'examiner la configuration d'un agglomérat issu de l'assemblage de deux agrégats et de déterminer les nombres de connexions établies simultanément entre eux. Si ce nombre est faible, l'agglomérat s'effondrera aisément sous la contrainte et redonnera naissance à deux agrégats. À l'inverse, si le nombre de connexions est élevé, il est au maximum de l'ordre de 18 pour deux agrégats de cubes agglomérés, l'agglomérat résistera d'autant mieux ou plus longtemps à une contrainte extérieure forte. Cette corrélation entre le taux de carbone organique et la stabilité des agrégats du sol a été établie par des chercheurs de l'INRA.

Si ce modèle élémentaire permet de se représenter aisément un agglomérat du sol, il est cependant loin d'intégrer la complexité de ces systèmes, que nous voulons ignorer ici.

Pollution des systèmes par les ions aluminium

Les sols fertiles constituent pour les racines un milieu accueillant, poreux et stable. Les liquides et les gaz y circulent facilement. Ils fournissent des surfaces spécifiques élevées permettant de bonnes teneurs en substances humiques, et des potentialités alimentaires fortes puisque ces substances sont capables de retenir les éléments nutritifs. En milieu neutre ou légèrement basique, les ions calcium et magnésium interagissent avec les matières organiques et inorganiques. En milieu acide, le cation aluminium trivalent devient structurant après élimination des autres types d'ions.

Interactions entre acides humiques et ions aluminium en solution aqueuse acide (pH 5)

La charge nette des hydrolysats d'aluminium dépend fortement de la concentration en ions aluminium et hydrogène. Dans les conditions de l'étude des systèmes à pH 5 et en milieu fortement dilué en ions aluminium, les ions trivalents sont majoritairement présents devant les monovalents et les divalents. Les substances humiques complexées sont donc porteuses de motifs divalents, monovalents, neutres ou négatifs, ces derniers résultant de la présence de groupes fonctionnels acide carboxylique dissocié. Il peut en résulter des interactions fortes intra- et intermoléculaires qui modifient fortement les caractéristiques conformationelles de la macromolécule. Parallèlement, en induisant localement la formation de microdomaines hydrophobes supplémentaires, la complexation diminue la solubilité de la macromolécule. Les caractéristiques physico-chimiques des macromolécules sont donc fonction des concentrations relatives en ions aluminium et en acides humiques. Pour une concentration en ions aluminium donnée, la perturbation sera forte lorsque les substances humiques sont présentes à l'état de trace et faible en présence d'un excès d'acides humiques. Cependant, la concentration en acides humiques requise pour une bonne cohésion des sols n'est pas un paramètre susceptible de varier dans de grandes proportions et généralement il existe une concentration superficielle optimale.

Interactions entre les ions aluminium et le corindon en suspension aqueuse acide

Sous ses différentes formes, l'aluminium entre pour près de 10 % dans la composition du sol. Dans nos expériences, le corindon a été utilisé sous forme de poudre de dimension moyenne égale à 1,6 micromètres, développant une surface de 3 m2 par gramme de matière sèche. En milieu acide, le corindon est très faiblement soluble et développe en surface des sites porteurs d'ions aluminium fortement hydratés chargés positivement, pour lesquelles la densité de surface peut être dérivée de la mobilité des particules en présence d'un champ électrique. L'environnement du corindon est de ce fait constamment pollué par des ions aluminium. Sa surface présente une analogie chimique avec certaines facettes d'argile comme la kaolinite et la gibbsite.

Interactions entre les ions aluminium et la kaolinite en suspension aqueuse acide

La kaolinite est une des argiles assurant dans les sols la cohésion entre constituants de taille plus importante, grâce au colmatage établi au niveau de la jonction. La déstabilisation de ce colmatage induit donc l'effondrement de l'ensemble de l'agglomérat. La kaolinite n'est pas soluble en sol acide mais adsorbe en surface les ions aluminium issus de l'environnement acide. Cette adsorption d'ions aluminium induit des interactions très fortes avec les substances humiques et il en résulte des couches organiques interfaciales dont l'épaisseur et la densité sont fonction des doses respectives en substances organiques, en argile et en ions aluminium.

Systèmes ternaires

Les résultats obtenus à partir de nos investigations sur les deux systèmes, corindon et kaolinite, ont mis en évidence deux types d'interactions majeures.

Dans le cas du corindon, tout se passe comme si les interactions de nature électrique entre la surface et la matière organique ne jouaient aucun rôle. En effet, avec le temps, la distribution initialement aléatoire des différents sites chargés et neutres au sein de la macromolécule est modifiée au bénéfice d'une distribution ségrégées des mêmes sites. Si la distribution aléatoire est favorable à la formation de liens intermoléculaires et partant permet l'agrégation des systèmes, la ségrégation qui fait que les chaînons hydrophobes de la macromolécule se rapprochent des sites hydrophobes de la surface favorise la fragmentation des agrégats. Le sens inattendu du transfert qui en fait rapproche certains groupements chargés positivement de la macromolécule des groupes positifs résiduels de la surface, s'explique cependant si l'on se rappelle que les sites positifs sont également hydrophobes. C'est cet effet qui l'emporte finalement, car les interactions fortes entre les ions aluminium de la surface et les acides carboxyliques des substances humiques des chaînons voisins génèrent des paires d'ions déshydratées. L'état d'équilibre final qui suppose l'existence d'une ségrégation des sites hydrophobes et hydrophiles, les premiers se concentrant au niveau de l'interface, les seconds étant repoussés au loin vers l'extérieur de la couche, se traduit donc par une dispersion totale des agrégats en leurs composants.

Dans le cas de la kaolinite, les ions aluminium chargés positivement et adsorbés en surface ne subissent pas de complexation et gardent donc leur eau d'hydratation. Au niveau des substances humiques, ils induisent donc un effet répulsif vis-à-vis des chaînons positifs et attractifs vis-à-vis des chaînons négatifs. À l'état d'équilibre, les sites négatifs se concentrent au niveau de la paroi, les sites positifs sont repoussés au loin vers l'extérieur de la couche organique.

La pollution par les ions aluminium produit donc des couches organiques interfaciales dont la structure électrochimique d'équilibre est imposée par la paroi inorganique. Quel que soit le type de ségrégation finale, la migration lente des ions au sein de la couche est susceptible d'enclencher le processus de fragmentation d'agrégats et de provoquer in fine l'effondrement des structures. La fragmentation des agrégats résulte de la répulsion induite entre sites hydrophiles, d'une part, chargés positivement, situés dans la zone externe de la couche organique d'autre part.

Nous ne savons pas grand chose des vitesses de transfert des ions si ce n'est que ces transferts s'accompagnent d'une certaine reconformation de la macromolécule et qu'ils limitent la vitesse de fragmentation des agglomérats. Dans une expérience in vitro, on peut déterminer à chaque instant la distribution en masse des agrégats et fragments. De la fréquence en masse des agrégats de plus grandes masses analysée sur la base de modèles théoriques, on obtient des informations sur le mécanisme des processus de rupture. Lorsque la fragmentation résulte de la ségrégation entre groupements chargés électriquement, elle est irréversible : un fragment détaché d'un agrégat ne va plus se combiner à un autre fragment, du fait de la grande portée des interactions électriques de nature répulsive existant entre les groupes positifs situés en périphérie. À l'inverse, lorsque la fragmentation résulte de la ségrégation entre groupes hydrophiles et hydrophobes, elle n'est pas irréversible : un fragment pourra se combiner à nouveau à un autre fragment lors d'une collision, en raison de la très faible portée des interactions. Le résultat est que la vitesse de la décroissance des masses est plus faible dans le deuxième cas que dans le premier. Des expériences effectuées sur les deux types de colloïdes, corindon et kaolinite, ont montré que la dispersion totale des agrégats en suspension aqueuse nécessite plusieurs semaines. On n'a aucune indication sur la vitesse d'effondrement de sols agricoles acides.

Les effets de la pollution ont été mis en évidence sur des systèmes simples et il est impossible d'en prévoir les effets sur un système un peu plus complexe qui serait constitué d'un mélange de corindon et de kaolinite. Pour que la cohésion de l'ensemble soit réalisée, les connexions doivent être établies entre les différents types de parois.

Remédiation

J'ai tenu à citer les effets de la pollution induite sur deux systèmes par les ions aluminium. Il est évident que porter remède à l'un ou l'autre de ces deux systèmes nécessite la mise en Suvre de méthodes appropriées. Parmi les techniques déjà mises en Suvre on peut citer l'épandage de chaux et de magnésium sur les sols acides pour induire un échange d'ions. L'opération n'est pas triviale et le résultat n'est pas garanti dans la mesure où les vitesses d'échange et les paramètres de l'équilibre ionique sont fortement dépendants de la nature hydrophile ou hydrophobe de l'environnement du ligand. Comme alternative, on pourrait proposer d'incorporer à l'eau d'irrigation des substances humiques complexées par du calcium ou du magnésium. À ce jour, je n'oserai en privilégier aucune dans la mesure où je suis incapable d'en prévoir les effets à moyen et à long termes. Cela revient à privilégier la prévention.

Des solutions ont été proposées pour contrer l'érosion des sols résultant d'un manque de matières organiques, ce qui constitue le cas le plus simple. Il a été démontré que le polyacrylamide, un polymère de synthèse utilisé dans certains procédés de forage pour contrôler notamment l'extraction des boues, présente un intérêt évident. En effet, l'adsorption du polymère sur les grains du sol renforce la cohésion des agrégats. On a observé que les eaux de ruissellement s'écoulant dans les sillons traités sont limpides et que les sols résistent plus longtemps à la battance. L'application de polyacrylamide n'a cependant pas été immédiatement couronnée de succès. En effet, les premiers essais effectués dans les années 1960 se sont soldés par des échecs car on n'a pas su doser le polymère, du fait que l'on ignorait les différents modes d'action de ces matériaux. Plus récemment donc, en raison du progrès des connaissances dans le domaine de l'agrégation et de la fragmentation induites par polymère, ces problèmes particuliers du dosage et du mode d' application ont été résolus. Des études in vitro peuvent valablement fournir les informations pouvant conduire à une application sur champs et le procédé est appliqué notamment aux États Unis. Il faut dire que le curage des étangs, canaux et rivières résultant de l'érosion des sols a un coût certain.

L'application de substances organiques naturelles et éventuellement de polymère de synthèse peut avoir un effet bénéfique sur les terres agricoles soumises à une culture intensive età des traitements par herbicides et pesticides renouvelés. Il est à redouter que seule une fertilisation acquise par des apports d'engrais en quantités de plus en plus importantes permette de multiplier les récoltes, lorsque par manque de substances organiques, la fertilité naturelle du sol régresse. Par ailleurs, il est connu que la culture en serre bénéficie déjà de ce type de traitement par des substances humiques solubles extraites de déchets végétaux.

Reste donc entier le problème des sols agricoles pollués par des substances diverses. Dans ce cas, en l'état actuel des connaissances, créer des plants susceptibles de croître dans les sols pollués reste une alternative audacieuse.

Pour terminer mon intervention, je voudrais souligner que je n'ai pas parlé des sites contaminés par des substances comme les hydrocarbures et les solvants chlorés, qui méritent une attention particulière en raison du nombre de sites contaminés. Les techniques de remédiation employées à ce jour comme l'injection d'agents tensioactifs pour déplacer le polluant, ne permettent de traiter in situ que des zones de dimensions restreintes . Il n'est pas évident que cette méthode de nettoyage donnera naissance à des sols structurés et fertiles qui resserviront un jour à l'agriculture.

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