Entretien
Chapitres
Notice
Langue :
Espagnol, castillan
Crédits
Université Toulouse II-Le Mirail SCPAM (Publication), Université Toulouse II-Le Mirail (Production), Bruno BASTARD (Réalisation), Susy Delgado (Intervention), Carla Fernandes (Intervention)
Conditions d'utilisation
Droit commun de la propriété intellectuelle
DOI : 10.60527/r52k-r116
Citer cette ressource :
Susy Delgado, Carla Fernandes. UT2J. (2004, 1 janvier). Entretien avec Susy Delgado , in Guarani. [Vidéo]. Canal-U. https://doi.org/10.60527/r52k-r116. (Consultée le 19 mars 2024)

Entretien avec Susy Delgado

Réalisation : 1 janvier 2004 - Mise en ligne : 10 octobre 2007
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Descriptif

Susy Delgado, auteur-poète paraguayenne, nous parle de la situation linguistique du Paraguay qui a deux langues officielles, l'espagnol et, depuis 1992, le guarani. Elle évoque les incidences de ce bilinguisme national sur la production culturelle du pays et surtout sur son oeuvre.

Interview : Carla Fernandes
Réalisation-Montage : Bruno Bastard.

> Voir aussi "Poésie du Paraguay : Susy Delgado".

 

Intervention
Thème
Documentation

Le guarani, langue officielle du Paraguay
Avant le guarani n’était que langue nationale du Paraguay. Ensuite, il est devenu aussi langue officielle. Peux-tu nous expliquer à quel moment et ce que cela a signifié pour tous ceux qui, au Paraguay, parlent guarani ?
Le Gua
Oui. En 1992, une nouvelle Constitution a été proclamée. Il s’agit de notre dernière Constitution, dans laquelle le guarani a été déclaré langue officielle, au même titre que l’espagnol. Et il s’est agit d’un fait historique, de revendication, très important pour le guarani, car bien que dans les discours, et sous une forme déclamatoire fausse à mon sens, depuis toujours historiquement, on dise que le guarani était notre langue aimée, cependant, dans les faits, tout au long de cette histoire, le guarani s’est retrouvé relégué, et cela dans tous les domaines. Ce n’est que récemment, que cette reconnaissance concrète comme langue officielle a ouvert les espaces ou les portes, qui faisaient défaut à la langue guarani et plus particulièrement grâce à son intégration dans les cours, postérieurement, quelques années après, avec la mise en place de la réforme éducative. Ce fut un événement fondamental qui a réactivé ou apporté le souffle qui manquait, depuis longtemps, à la langue guarani.
Qu’est-ce que le jopara ?
Le jopara est un mélange. C’est le mélange qui est utilisé quotidiennement. C’est la langue du peuple, le mélange d’espagnol et de guarani. En réalité, il y a des gens qui nient l’existence du jopara, en se fondant sur le fait que les langues en contact fusionnent toujours. On peut s’en rendre compte à chaque fois que la situation se produit. Il y a des gens qui nient l’existence du jopara, parce qu’il y a toujours une base plus forte d’espagnol, ou une base plus forte de guarani. Dans ce cas, les linguistes et les spécialistes de la question disent : là, en réalité, on est en train de parler guarani, ou bien, en réalité, on parle espagnol, disent-ils. En raison d’un plus ou moins grand mélange, ou avec une plus ou moins grande quantité d’emprunts, rien de plus. Au Paraguay, c’est un des sujets polémiques de la situation bilingue.
Pourrais-tu nous dire, grosso modo, sans que ce soit une donnée statistique, quel est le pourcentage de bilingues au Paraguay ?
Le pourcentage de bilingues au Paraguay est d’environ 60%. Il y a environ 35% de monolingues en guarani, tandis que les monolingues en espagnol sont bien moins nombreux. Les monolingues en espagnol se trouvent, c’est normal, on peut aisément le comprendre, dans les zones urbaines et surtout dans la capitale et les monolingues en guarani se trouvent en zone rurale, naturellement.
Quelles incidences a ce bilinguisme sur la production culturelle du pays ?
Petit à petit, il commence a avoir des incidences mais peu nombreuses pour l’instant parce que le guarani continue surtout à être une langue orale et le processus qui débouche, par exemple, sur la production littéraire ou autres est relativement récent, parce que la réforme éducative qui prévoit l’alphabétisation en langue guarani est assez récente : elle n’a qu’une dizaine d’années. Ses résultas pour l’instant ne commencent qu’à se faire sentir. A cela il faut ajouter d’autres facteurs de type socio-historique qui déterminent une encore faible participation du guarani, notamment dans certains types de production. La littérature compte sur une sorte de tradition parce que, d’une certaine façon, on écrit de la littérature depuis longtemps avec une écriture un peu anarchique, avant l’élaboration de certaines normes fixes. En 1950, a eu lieu un Congrès, à Montevideo, au cours duquel les plus grands spécialistes de la question ont fixé des normes graphiques, par exemple, mais même avant cela, on produisait de la littérature avec une graphie peut-être un peu anarchique. De toute façon, la littérature elle a déjà à son actif une certaine production, qui aujourd’hui est en augmentation. Elle est en pleine croissance depuis la reconnaissance officielle du guarani, en 92, avec la nouvelle Constitution de cette année-là et ensuite avec la mise en place de la réforme éducative.
On établissait une distinction entre littérature guarani et littérature en guarani. On appelait littérature guarani simplement celle qui venait des cultures indigènes, des ethnies guarani. La littérature en guarani c’est celle qui provient de la production métisse ou blanche. Selon une autre optique, la littérature guarani serait tout ce qui est produit aujourd’hui par nous autres, les métis, par ceux qui sommes considérés désormais aujourd’hui comme les propriétaires, les héritiers légitimes et les propriétaires, à présent, de cette langue et de cet héritage. C’est pourquoi il y a des gens qui utilisent cette nouvelle dénomination, en englobant toute cette nouvelle littérature.
La poésie a toujours été le genre le plus cultivé au Paraguay, dans les deux langues, en guarani aussi. Au Paraguay, il y a une production de poésie très nombreuse. Il n’y a guère d’explications à ça, surtout si on prend en considération la situation économique, culturelle, le système d’éducation du pays. Les écrivains au Paraguay écrivent un peu avec une étrange résistance à toute cette situation absolument défavorable. Le Paraguay a l’un des indices de lecture les plus faibles du continent et cependant il y a une production très importante de littérature et particulièrement de poésie.

Une littérature bilingue
Tu as des poèmes en guarani, en espagnol, tu as aussi un livre de contes publié en espagnol. Pourrais-tu nous expliquer ces différences ?
Je ne sais pas si c’est parce que je suis Paraguayenne, ou si de naissance, simplement, je suis plus tentée par la poésie. La poésie m’a toujours attirée beaucoup plus que d’autres genres, et en fin de compte, après avoir fait une première tentative, une première ébauche, comme je dis, dans le domaine du conte, je ne sais pas si pour finir, je n’ai pas écrit simplement à nouveau de la poésie. Finalement, peu m’importe. Je me sens poète, fondamentalement. Ça oui.
Pour ce qui est des langues que tu choisis pour la poésie et la prose : aurais-tu, par exemple, pu écrire des contes en guarani, comme les poèmes ?
Je crois qu’il faut que je me lance à le faire. De la même façon, qu’un jour j’ai dû me lancer à écrire de la poésie en guarani. Je l’ai fait, bien après avoir commencé à écrire en espagnol, en raison d’un respect excessif, d’une pudeur exagérée à l’égard de ma langue maternelle. De la même façon, je crois qu’il faut que j’ose écrire de la prose en guarani, des contes ou autre chose.
Les thèmes qui me viennent en guarani sont surtout ceux en rapport avec la femme de la campagne, que j’ai été et que, dans le fond, je continue d’être intérieurement. J’ai eu une enfance paysanne, typiquement paraguayenne. J’ai grandi avec mes grands-parents qui étaient deux modestes agriculteurs paraguayens, de la campagne du Paraguay et les expériences caractéristiques de la campagne qui ont été les miennes durant cette enfance m’ont profondément marquée. Avec le temps, les thèmes de l’enfant paysan, la femme paysanne, les habitudes, les coutumes, les odeurs, ainsi que les tristesses, la solitude et la mélancolie et les angoisses de la campagne ont fleuri dans mon œuvre. Ce sont les thèmes qui naissent en moi en guarani. C’est comme une forme de récupération de l’enfance. Les couleurs et aussi les angoisses, les rêves de l’enfance, comme s’ils voulaient sortir dans leur propre langue, qui est le guarani.
Dans cet ensemble, il y a un recueil de poèmes qui est organisé autour du feu, de cet élément. Quelle importance a le feu dans le foyer guarani ?
Ce livre Tataypype recueille justement les moments vécus autour du feu, à la campagne, dans la cuisine paraguayenne. Dans le recueil, le feu est symbolique et sert aussi à récupérer un élément bien réel dans la cuisine paysanne, dans les foyers paraguayens. J’ai voulu récupérer, dans ce recueil, cette habitude si agréable, qui consiste à s’asseoir autour du feu, que j’ai connue avec mes grands-parents. Mon grand-père aimait beaucoup nous raconter des contes, près du feu, tôt le matin et aussi en soirée. Et j’ai eu la chance d’avoir en mon grand-père un excellent conteur. Lorsque j’ai eu quelques années de plus, je l’ai observé pour voir comment il racontait. J’observais comment il bâtissait ses récits, faisait les pauses, comme il montait le ton, marquait l’emphase, comment il créait le suspense et l’inquiétude. Par la suite, de loin, cela m’a permis d’analyser un peu ce qu’est le conteur populaire, qui garde les clés du récit paraguayen. C’est difficile ensuite de transposer ça sur le papier mais c’est un thème passionnant, qui je crois peut apporter beaucoup à un écrivain. En revenant un peu à tout ça, à cette habitude d’écouter des contes près du feu, je crois que c’est dans cette expérience quotidienne avec mes grands-parents qu’a été semée en moi cette graine, qui avec le temps et dans ma jeunesse, chercherait à être cultivée par les mots. Je crois que la semence profonde, qui ensuite chercherait ainsi l’expression, vient de là. Et la parole est bien entendu une valeur essentielle que nous recherchons tous au Paraguay. Nous la recherchons tous, peut-être sans le savoir, et peut-être sans le savoir héritons-nous cette valeur ancienne, la valeur la plus haute de nos ancêtres guarani. Je crois que nous ne cessons de la rechercher. Dans ce feu paysan, que j’ai connu et vécu pendant mon enfance, la parole nous réunissait, le feu de la parole nous réunissait. Et d’une façon ou d’une autre, nous revenons toujours à cette quête.
Et dans cet autre livre (Ayvu membyre. Hijo de aquel verbo, Fils de ce verbe), je me suis centrée sur cette quête de la parole en effectuant une sorte de voyage intérieur, à la recherche des fonds les plus enfouis où est gardée la parole que nous recherchons. C’est ce qui se passe aussi dans le cas d’un écrivain en langue guarani. Car nous sentons que, dans une certaine mesure nous avons perdu le guarani et dans une certaine mesure, par grande chance, il a survécu. Mais nous sommes comme en phase de récupération de notre propre langue, de profonde réconciliation avec elle, de recherche de ses profondeurs, de ses accents les plus profonds, de sa flexibilité, de ses aromes les plus profonds et mon recueil est une sorte de voyage vers ça. Et vers le sens essentiel de la parole, qui pour nous est sans doute toujours le même que pour les Guarani : celui de l’âme.
D’où ce titre en espagnol, Fils de ce verbe, de ton dernier recueil bilingue ?
J’ai pris comme titre un mot qui marque un peu l’inspiration, la source de ce livre, l’Ayvu, comme parole primordiale et le titre guarani qui m’est venu est Ayvu membyre. J’ai eu beaucoup de mal à le traduire en espagnol, en décomposant ses différentes parties, l’équivalent serait ‘le fils orphelin de cette parole primordiale’ dont parlaient nos ancêtres guaranis. Après avoir beaucoup travaillé, j’ai trouvé cette petite formule qui m’a paru la plus proche : ‘fils de ce verbe’, verbe dans le sens de parole, un peu dans le sens biblique, qui m’a paru la plus adéquate, c’est pourquoi j’ai gardé ‘Fils de ce verbe’.

Diffusion et échanges internationaux
Ces recueils en guarani que tu as écrits, c’est très intéressant, ont été traduits en anglais, allemand, portugais. Comment l’expliques-tu ?
Je n’en ai pas la moindre idée. C’était une surprise inattendue à chaque fois, des cadeaux que je n’attendais pas. On m’a toujours étonnée en m’apprenant que mes travaux avaient été traduits. Tous, presque tous, sont des textes écrits en guarani. Un seul de mes textes en espagnol, un très long poème intitulé « Mon peuple » a aussi fait l’objet d’une traduction en portugais. Dans tous les autres cas, il s’agit de textes originaux en guarani.
Le Paraguay fait partie du Mercosur, est-ce que cela a des incidences sur les échanges culturels et littéraires du pays ?
Dans une certaine mesure, il y en a toujours eu et par ailleurs, il reste toujours beaucoup à faire. Culturellement parlant, le Mercosur a toujours existé, bien avant que cette dénomination ait été inventée, bien avant. Et en même temps, les rapprochements, le travail, les facilités de contact dans bien des domaines ne suffisent toujours pas. Il en est de même pour les échanges culturels et littéraires. Sur le plan littéraire, depuis quelques années, les communications étant plus fluides, plus simples, de plus grands rapprochements s’effectuent petit à petit. Mais, comme je le disais, nous sommes loin du compte. Actuellement, par exemple, nous devrions disposer d’une revue culturelle du Mercosur, des choses comme ça qui matérialisent plus clairement les liens profonds qui nous unissent de fait. Lorsqu’il nous arrive de nous réunir, nous confirmons toujours ces liens profonds, cet intérêt commun qui est le nôtre. Et malgré ça, il faut que nous travaillions un peu plus à les transformer en rapprochements concrets et en faits concrets.

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Le guarani, langue officielle du Paraguay
Antes el guaraní sólo era idioma nacional o lengua nacional de Paraguay. Después pasó a ser también lengua oficial. ¿Nos puedes explicar en qué momento y lo qué vino a significar eso para los hablantes en guaraní de Paraguay, los guaraní hablantes?
Sí. En el año 1992, se promulgó la nueva Constitución, la última que tenemos en Paraguay, en la cual se declaró al guaraní lengua oficial, en paridad de condiciones con el castellano. Y este fue un hecho histórico de reivindicación, muy importante para el guaraní, que si bien en los discursos, en una forma declamatoria falsa a mi entender, en toda la historia se venía diciendo que el guaraní era nuestra lengua amada, sin embargo, en los hechos, durante toda esa historia, vino siendo relegada en todos los ámbitos. Recién este hecho concreto de su declaración como lengua oficial vino a abrirle los campos o las puertas que le faltaban a la lengua guaraní y específicamente su llegada a las aulas, posteriormente, unos años después, con la implementación de la reforma educativa fue un hecho fundamental, eso fue renovarle o traerle los aires que le faltaban a la lengua guaraní desde hacía mucho tiempo.
¿Qué es el jopara?
El jopara es una mezcla. Es la mezcla que se utiliza cotidianamente. Es la lengua de la gente, es la mezcla del castellano y del guaraní. Que en realidad hay quienes niegan la existencia del jopara, teniendo en cuenta que siempre las lenguas en contacto están interelacionándose. En toda situación similar se puede comprobar eso. Y hay quienes niegan que exista el jopara, porque siempre hay una base más fuerte del castellano, o una base más fuerte del guaraní. En cuyo caso dicen los lingüistas y los entendidos, bueno estamos hablando en realidad en guaraní, o estamos hablando en realidad en castellano, dicen. Por una mayor o menor mezcla, o con una mayor o menor cantidad de préstamos, nada más. Es uno de los temas polémicos de esta situación bilingüe del Paraguay.
Así de manera muy aproximativa, ¿nos podrías decir el porcentaje de gente bilingüe en Paraguay?, sin que sea una cifra de estadísticas, muy actualizada.
Ronda el 60%, aproximadamente, el porcentaje de hablantes bilingües en Paraguay. Los monolingües en guaraní están en el 35% aproximadamente, mientras que los monolingües en castellano son mucho menores, mucho menores. Los monolingües del castellano corresponden, es natural, se puede entender fácilmente, corresponden a las áreas urbanas y sobre todo a la capital, y los monoligües en guaraní al campo, naturalmente.
¿Qué incidencias tiene en la producción cultural del país este bilingüísmo?
Va teniendo incidencia poco a poco, todavía no mucha, porque el guaraní sigue siendo preferentemente una lengua oral, y el proceso como para producir, por ejemplo, literatura y otro tipo de cosas es todavía relativamente reciente, porque tenemos una reforma educativa, que contempla la alfabetización en lengua guaraní, que es todavía bastante reciente: tiene nada más una década. Sus resultados son todavía muy incipientes. A lo cual hay que agregar algunos otros datos de tipo social histórico que condicionan el hecho de todavía una escasa participación del guaraní, particularmente en la producción de cierto tipo de cosas. La literatura tiene una cierta tradición ya porque, de alguna manera, se vino produciendo literatura con una escritura un poco anárquica, antes del establecimiento de ciertas pautas fijas. En el año 50, 1950, se realizó un congreso en la ciudad de Montevideo, en el cual los especialistas más respetados de este tema, fijaron algunas pautas en cuanto a la grafía, por ejemplo, pero de alguna manera aún antes de eso se fue produciendo literatura con una grafía tal vez un tanto anárquica. Pero de todas maneras la literatura, sí, tiene ya una cierta producción, y que hoy en día está en crecimiento. Está en pleno crecimiento después del reconocimiento oficial de la lengua en el año 92, con la nueva Constitución de ese año, y luego con la implementación de esa reforma educativa.
Se hacía una disquisición sobre la literatura guaraní y la literatura en guaraní, denominando literatura guaraní solamente aquella que provenía de las culturas indígenas de las etnias guaraníes, y llamando literatura en guaraní a aquella que viene ya de la producción mestiza o blanca. Otra forma de entender las cosas es que, litertura guaraní viene a ser todo aquello producido hoy en día por nosotros, los mestizos, por los que se supone que somos hoy en día ya los dueños, los herederos legítimos y los dueños ya de esta lengua y de esta herencia. Entonces, hay quienes toman esta nueva denominación englobando a toda esta nueva literatura.
La poesía ha sido siempre el género más cultivado en Paraguay en las dos lenguas y también en guaraní. En Paraguay existe una tremenda producción de poesía. Lo cual no tiene muchas explicaciones si vamos a atender la situación económica, cultural, educacional del país. Los escritores en Paraguay escriben un poco con una extraña resistencia a toda esa situación absolutamente desfavorable. El Paraguay tiene uno de los índices más bajos de lectura en el continente y sin embargo, hay una producción muy grande de literatura en alguna medida, y especialmente de poesía.

Une littérature bilingue
Tienes poemas en guaraní, poemas en español, o castellano y tienes también cuentos, un libro de cuentos publicado en español, ¿nos podrías explicar estas diferencias?
Yo no sé si eso es porque soy paraguaya, o si es porque nací más inclinada a la poesía simplemente. Siempre me ha llamado mucho más la poesía que otros géneros, y al fin y al postre, después de haber hecho un primer intento, un primer borroneo digo yo, en la cuentística, no sé si al fin de cuentas no hice poesía nomás, nuevamente. Y finalmente no me importa demasiado. Me siento fundamentalmente poeta. Eso sí.
Y en cuanto a los idiomas que eliges para la poesía y la prosa: ¿hubieras podido escribir cuentos en guaraní, por ejemplo, como los poemas?
Creo que me tengo que atrever. Igual que un día me tuve que atrever a escribir poesía en guaraní. Porque lo hice años más tarde de haber empezado en castellano, por un excesivo respeto, por un pudor exagerado hacia mi lengua materna, del mismo modo creo que tengo que atreverme a escribir prosa, o cuentos, o lo que sea en guaraní.
En guaraní me nacen sobre todo aquellos temas relacionados con la mujer campesina que fui y que en el fondo soy todavía interiormente. Yo tuve una infancia campesina típica del Paraguay. Crecí con mis abuelos que eran dos modestos agricultores de Paraguay, de la campiña paraguaya, y las vivencias propias del campo que yo tuve en esa niñez me marcaron profundamente. Y con el tiempo, florecieron en mis poemas los temas, los temas del niño campesino, de la mujer campesina, de los hábitos, de las costumbres, de los olores, también de las tristezas, la soledad, y la melancolía, y las angustias del campo: esos son los temas que me nacen en guaraní. Es como si fuera una forma de recuperar mi infancia... Los colores y también las angustias, los sueños de la infancia, como si quisieran salir en su propia lengua, que es el guaraní.
En ese conjunto hay un poemario que está organizado alrededor del fuego, de este elemento, ¿Cuál es la importancia de este fuego en el hogar guaraní?
Este libro Tataypype recoge justamente las vivencias alrededor del fuego campesino, de la cocina paraguaya. Allí el fuego es simbólico y es también rescatar un elemento muy real en la cocina campesina, de los hogares paraguayos. Y yo quise en ese poemario rescatar aquel hábito tan rico de sentarse junto al fuego, que yo lo viví con mis abuelos. Mi abuelo era muy afecto a contarnos cuentos alrededor del fuego, por las mañanitas y también por las noches, y tuve la suerte de tener en mi abuelo un gran contador de cuentos. Cuando yo ya fui un poco mayor, yo lo observaba mirando como relataba. Lo observaba como hilvanaba sus relatos, como hacía las pausas, como subía los tonos, como marcaba los énfasis, como le daba a algo un suspenso y una inquietud. Y eso me permitió luego desde lejos analizar un poco lo que es el relator popular que guarda las claves del relato paraguayo. Es difícil eso trasladar luego al papel pero es un tema apasionante que creo que a un escritor puede aportarle mucho. Y volviendo un poco a todo aquello, a aquel hábito de escuchar cuentos junto al fuego, yo creo que en aquella vivencia cotidiana, con mis abuelitos, allí se sembraron en mí una semilla que con el tiempo, ya en mi juventud, buscaría el cultivo de la palabra. Yo creo que allí estuvo la semilla profunda que después buscaría expresarse de esa manera para mí. Bueno, y la palabra es desde luego un valor esencial detrás de lo cual vamos en Paraguay. Vamos todos, tal vez sin saberlo, y sin saberlo heredamos tal vez aquel valor antiguo, el valor más alto de nuestros abuelos guaraníes. Yo creo que vamos siempre detrás de ella. En ese fuego campesino, que yo conocí, que viví durante mi infancia, nos reunía la palabra, nos reunía el fuego de la palabra. Y de alguna manera siempre estamos volviendo a esa búsqueda.
Y en este otro libro yo me centré más aún en esa búsqueda de la palabra haciendo una especie de viaje interior en busca de los cuencos más profundos en los que se guarda la palabra que estamos buscando. Esto también pasa en el caso de un escritor en lengua guaraní, porque nosotros sentimos que el guaraní en alguna medida se nos ha perdido y en alguna medida, por suerte maravillosa, ha sobrevivido. Pero estamos como en un rescate de nuestra propia lengua, en una reconciliación profunda con ella, en una búsqueda de sus profundidades, de sus acentos más hondos, de sus flexibilidades, de sus aromas más profundos y este libro mío fue una especie de viaje hacia eso. Y hacia el sentido esencial de la palabra, que para nosotros sigue siendo tal vez el mismo que el de los guaraníes, que es el del alma.
¿De ahí el título castellano, Hijo de aquel verbo, de este tu último poemario bilingüe?
R8 Yo tomé como título de este libro una palabra que marca un poco la inspiración, la fuente de este libro, el Ayvu, como palabra primigenia y me salió el título Ayvu membyre en guaraní, que me costó muchísimo traducir al castellano, y que desglosando un poco en sus partes sería ‘el hijo huérfano de aquella palabra primigenia’, de la que hablaban nuestros abuelos guaraníes. Después de trabajar muchísimo, encontré esta pequeña fórmula que me pareció la más cercana: ‘hijo de aquel verbo’, verbo en el sentido de palabra, un poco con el sentido bíblico, que me pareció muy adecuado para este caso y quedó como ‘Hijo de aquel verbo’ por eso.

Diffusion et échanges internationaux
Estos poemarios en guaraní que escribiste, es algo muy interesante, se tradujeron al inglés, al alemán y al portugués. ¿Cómo lo explicas?
No tengo la menor idea. Fueron todas sorpresas imprevistas, fueron regalos que yo en absoluto no esperaba. Siempre me sorprendieron con la noticia de que estos trabajos míos habían sido traducidos. Todos ellos, casi todos ellos, textos míos escritos originalmente en guaraní. Uno solo de mis textos en castellano, un poema muy extenso, que se titula ‘Mi pueblo’ es el que también mereció una traducción al portugués. En los demás casos son todos textos originales del guaraní.
Paraguay forma parte del Mercosur, ¿y esto tiene alguna incidencia a nivel de los intercambios culturales y literarios para el país?
En cierta medida siempre la tuvo y en alguna medida todavía falta mucho siempre. El Mercosur, culturalmente hablando, siempre existió, si se quiere, antes de que inventaran esa denominación, desde mucho antes.Y al mismo tiempo sigue faltando más acercamiento, más trabajo, más facilidades de conexión en muchos aspectos. También en el intercambio cultural y literario. En el plano literario, de unos años a esta parte, en que las comunicaciones son más fluidas, son más fáciles, se da paulatinamente un mayor acercamiento. Pero seguimos en deuda como digo. A esta altura deberíamos tener, por ejemplo, alguna gran institución suprarregional del Mercosur, deberíamos tener alguna gran revista cultural del Mercosur, cosas así que ejemplifiquen más claramente los lazos profundos que nos unen de hecho. Cuando de pronto nos reunimos, confirmamos permanentemente esos lazos profundos, ese interés común que tenemos. Y sin embargo, nos hace falta trabajar un poco más, para convertir eso en acercamientos concretos, en hechos concretos.

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