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Torfi H. Tulinius - Les sagas islandaises : enjeux et perspectives
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Descriptif
Interview de Torfi H. Tulinius, dans le cadre de la sortie de son ouvrage « Les sagas islandaises : enjeux et perspectives » publié le 16 février 2023.
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Transcription
Les sagas sont des œuvres littéraires du Moyen-Âge islandais. Saga, ça veut dire récit. Ce sont donc des œuvres narratives qui racontent des histoires, des histoires de toutes sortes composées en Islande entre le 12e et le 14e, 15e siècle, qui sont d’une richesse incroyable. Parmi les sagas, il y a quelques chefs-d’œuvre de la littérature narrative européenne. Elles ont en quelque sorte tout pour plaire. Elles ont des récits hauts en couleur, des personnages complexes et multiples, des événements intéressants et un très grand réalisme dans la présentation des faits, des personnes, des intrigues parfois assez complexes. Ce qui fait que c’est une littérature qui rappelle, à bien des égards, le roman tel qu’il s’est développé bien plus tard en Europe. J’ai voulu consacrer ma vie à la recherche sur les sagas parce que, jeune étudiant, je trouvais qu’il y avait beaucoup plus de choses à dire sur ces sagas qu’on m’avait enseigné, d’abord leur inscription dans l’ensemble de la culture et de la civilisation de l’Occident médiéval, leur complexité en tant qu’œuvre littéraire, leur qualité en tant qu’œuvre littéraire. Je sentais que sous la surface de ces sagas, de ces récits, il y avait quelque chose de plus, une plus-value d’humanité, si on peut dire, qu’on pouvait saisir en les lisant de manière très attentive et en employant des méthodes un peu plus modernes pour les interpréter. Les sagas islandaises passionnent leurs lecteurs depuis sept ou huit siècles parce que c’est de la bonne littérature. Les récits sont passionnants, les personnages sont mémorables. On sent quelque chose en dessous. Il y a un message que les auteurs essayent de faire passer, qu’il faut deviner et qu’il faut interpréter. C’est un peu comme un polar. Il y a pas mal de meurtres, mais ce n’est pas le meurtre qui est le plus important, c’est justement la réalité sociale humaine qui est décrite. Je travaille sur les sagas depuis une quarantaine d’années. J’ai commencé par certains groupes de sagas, les légendaires, et de fil en aiguille, j’ai étendu ma recherche à d’autres sagas. Ce livre est le produit d’une série de conférences que j’ai données au Collège de France en 2021 à l’invitation de William Marx. Je commence par situer l’Islande et expliquer que l’Islande, tout en étant très éloignée du reste de l’Europe, fait partie de l’Europe, en particulier fait partie de ce qu’on appelle la diaspora viking, ces peuples qui ont essaimé à travers la partie nord de l’Europe jusque dans l’Atlantique Nord, jusqu’en Islande et Groenland, comment les Islandais ont préservé la mémoire de cette diaspora. Et peu à peu, cette mémoire a été transformée en littérature parce que les Islandais voulaient préserver cette mémoire, préserver les liens qu’ils pouvaient avoir avec le reste de l’Europe. Avec la conversion au christianisme, l’arrivée de l’écriture, l’ouverture à la culture cléricale, à la Bible, etc., il y a un autre imaginaire qui s’est installé et il y a une sorte de fusion des imaginaires qui a donné lieu à cette littérature. On a cette chance en Islande qu’un auteur dont nous connaissons le nom, Ari le savant, a écrit vers 1120, 1130, un ouvrage où il donne les dates principales de la découverte de l’Islande, de son peuplement, de la fondation des principales institutions, de l’Assemblée, le Alþingi, la conversion au christianisme. Grâce à lui, les auteurs qui écrivaient à peu près un siècle après lui avaient une image de l’Islande des origines. C’est sur le fond de cette image de l’Islande des origines qu’ils ont construit leurs œuvres à partir d’une tradition orale, des œuvres littéraires d’une très grande sophistication, qu’on appelle les sagas des Islandais. Une variété de sagas, ce sont les sagas de contemporains. Ce sont des chroniques écrites au 12e, 13e siècle, qui racontent des événements du présent. Ce qui est intéressant, c’est qu’on a des sagas qui se passent dans le présent, dans un passé lointain à quatre ou cinq générations, et dans un passé légendaire. C’est intéressant de comparer ces sagas parce qu’elles donnent une image différente de la réalité. Elles transmettent la réalité d’une manière différente. Les sagas de contemporains, comme elles racontent des événements qui ont eu lieu de mémoire des premiers lecteurs, des lecteurs auxquels ces sagas étaient destinées, ne pouvaient pas se permettre de raconter des bobards. Il fallait rester dans la vérisimilitude, dans la véracité jusqu’à un certain point.
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