3e Printemps des SHS (2011) : (Se) décider ?

évènement
Mise en ligne : 15 avril 2011
DOI : 10.60527/7bst-3a60
URL pérenne : https://doi.org/10.60527/7bst-3a60
  • niveau 1 niveau 2 niveau 3
  • document 1 document 2 document 3
3e Printemps des SHS 2011

Descriptif

Ma décision est prise, cette année, ce sera la plage. L'année dernière, ce fut la montagne. Aujourd'hui, irrévocablement, je m'arrête de fumer. Je ne sais pas si cette décision tiendra longtemps, car je ne la prends pas pour la première fois. [En passant, je note l'expression : "prendre une décision". La décision est-elle une chose, une pensée, un objet, là, devant nous, comme à disposition, dont nous pouvons nous saisir ?] Néanmoins, le fait même de (me) décider avec fermeté me fait du bien : tout à coup, par ce seul fait de la décision, je m'empare de mes forces vives. Il y a peu, une loi a bien été votée, qui interdisait de fumer dans les lieux publics. Elle peut m'avoir influencé(e), ou convaincu(e). Je ne mesure pas exactement son incidence. Peut-être existe-t-il des outils pour cela. Je remarque seulement, à titre d'indice, que d'autres se sont arrêtés (tout au moins ont-ils pris, comme moi, la décision de le faire). À supposer que la loi m'y ait autoritairement poussé(e), dois-je dire que j'ai subi la décision de m'arrêter de fumer (plutôt que de la prendre) ? La loi était fondée en grande partie, sur des impératifs sanitaires et économiques. On dit que le coût pour le système de santé est prohibitif (cancers, maladies pulmonaires, etc.). La sagesse veut que, par tous les moyens prophylactiques, le tabac soit interdit. Le régime de l'interdiction absolue étant trop sévère, le compromis est préféré : l'individu demeure libre de son choix quand il ne met pas en cause la vie d'autrui. On se contentera donc d'une interdiction dans les lieux publics. C'est un calcul entre coût et liberté. En tant qu'individu, supposé rationnel, je n'ai subi la loi qu'en apparence ; en réalité, j'ai contribué à sa constitution. Ainsi le veut la représentation politique.

Je me surprends moi-même parfois à être un(e) familier(ière) de ces calculs, conscients ou inconscients, entre risques et avantages. Il y a peu, en voiture, abordant un rond-point, j'étais à deux doigts de renoncer au sens giratoire . Le prendre en sens inverse m'aurait fait gagner un temps considérable puisque je devais le parcourir en entier, ou presque. La démarche, certes osée, était néanmoins sans risque puisqu'il n'y avait personne. En un instant de clairvoyance et d'effroi, j'ai mesuré mon goût du risque confronté à mon attachement aux règles et à la peur de la sanction. J'en ai conclu que le jeu n'en valait pas la chandelle. Il n'y avait certes personne, mais la police parfois se cache pour surprendre les conduites à risque. La route, plus généralement, les espaces communs, sont balisés de recommandations et d'injonctions qui nous permettent de nous dispenser à chaque pas d'une mesure des risques et des profits. Nous appelons cela "règles" et nous leur accordons notre confiance en faisant l'hypothèse que tous les respectent, comme dans un jeu très sérieux.

Il me vient, à ce propos, l'idée d'une décision à laquelle personne n'a jamais pu opposer le moindre argument, ni même y contrevenir, du moins jusqu'à un passé récent. Celle du grand partage naturel. Il y a d'un côté les hommes, d'un autre, les femmes. XY, XX, selon le schéma commun. Entendons bien "décision...". Il y a, au beau milieu de ce mot, la scission, les ciseaux, la coupure. Ainsi, le monde a-t-il été originellement scindé en masculin et féminin. Cela ne fut, apparemment, le fait d'aucune concertation ni rationalité. Sauf exception malheureuse, la vie a été gouvernée par ce partage. La puissance de la médecine, de la génétique et de l'éthique place un coin dans ce partage initial longtemps reçu comme immuable. Il semblerait alors qu'il puisse m'appartenir, parfois, et sous certaines conditions, de choisir et de revenir, par ma décision, sur les décisions les plus inaccessibles.

Le cours de ces pensées est libre, peut-être aléatoire, j'en conviens. Je ne sais pas d'ailleurs si j'en suis l'acteur ou le jouet. Je serais sans doute bien avisé(e) de le réorganiser, le reconstruire en un parcours argumenté et convaincant, empruntant une méthode scientifique. Je peux aussi décider assister aux conférences organisées par la Maison européenne des sciences de l'homme et de la société, du 28 mars au 15 avril 2011. Je n'ai pas l'assurance de voir tous ces sujets traités ; d'autres le seront certainement ; je pourrai néanmoins y poser mes questions, y faire des remarques.

Car en ce lieu, et particulièrement au Printemps, la science se vit sur le mode de l'échange. Il ne tient donc qu'à moi.

Vidéos

La décision à l’œuvre
Conférence
02:04:59

La décision à l’œuvre

Biasi
Pierre-Marc de
Viart
Dominique
Massin
Marianne

Pierre-Marc De Biasi — L’(in)achèvement du texte : fiction critique et processus génétiques   « FINI! mon vieux! — Oui, mon bouquin est fini! (...) Je suis à ma table depuis hier, 8 heures du

Ressorts psycho-sociaux et neurologiques de la décision
Conférence
02:09:48

Ressorts psycho-sociaux et neurologiques de la décision

Delevoye-Turrell
Yvonne
Boraud
Thomas
Mignon
Astrid

Thomas Boraud — Et le vainqueur emporte la mise ! La prise de décision résulte de phénomènes de compétition entre plusieurs réseaux neuronaux distribués. Les corrélats neuronaux des processus

Les jeux de la décision (économie et risques)
Conférence
02:01:26

Les jeux de la décision (économie et risques)

Ekeland
Ivar
Demange
Gabrielle

Ivar Ekeland — Sommes-nous rationnels ? La théorie économique moderne repose sur l’hypothèse que les individus sont rationnels en un sens très précis : ils choisissent les meilleurs moyens pour

Statistiques, société et décision
Conférence
02:01:23

Statistiques, société et décision

Desrosières
Alain
Jayet
Hubert
Héran
François

Alain Desrosières — Avant, pendant et après : l’argument statistique dans le processus de décision La statistique n’est pas seulement une aide à la décision. Elle est elle-même le produit d’une

Intervenants et intervenantes

France

Chercheur en philosophie du langage à l'ISJPS, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne (en 2025)

Auteur d'une thèse de doctorat en philosophie (Paris 10, 2005)

Traduit de l'anglais en français. Chercheur en philosophie au CNRS, CURAPP-ESS (UMR 7319), Université de Picardie-Jules Verne, Amiens (en 2013)

France

Historien. Professeur des universités, titulaire de la chaire d'histoire du 19e siècle à Sciences Po et chercheur permanent au CHSP - Centre d'histoire de Sciences Po (en 2018)

Ancien élève normalien, agrégé d'histoire

Traduit du tchèque en français

Enseignant-chercheur (en 1996). A soutenu une habilitation à diriger des recherches en histoire contemporaine à Paris 1 en 2002

France

Agrégé de mathématiques (1966)

Président de l'AURDIP (Association des Universitaires pour le Respect du Droit International en Palestine)

Mathématicien. Professeur à l'Université de Paris-Dauphine, Centre de recherches de mathématiques de la décision (en 1987). Coéditeur de la collection "Annals of the CEREMADE" publié chez Birkhäuser (en 1983)

France

Professeure des universités en "Esthétique et Philosophie de l’art", UFR de philosophie, Sorbonne Université (en 2021) et Directrice du Centre Victor Basch (Centre de Recherches en esthétique et philosophie de l'art), EA 3552. Professeure émérite, Sorbonne Université (en 2022).

Agrégée et docteure en philosophie. Professeur à l'Ecole nationale supérieure d'arts appliqués et de métiers d'art, Paris (1985-2005), en esthétique à Rennes-2 (2005-2008), Lille-3 (2008-2014), Paris-Sorbonne (à partir de 2014).

France

Enseignant-chercheur en philosophie. Agrégé de philosophie (1989), docteur en philosophie (Paris 4 Sorbonne, 1994), titulaire de l'Habilitation à diriger des recherches (Paris 1, 2008).

Maître de conférences en philosophie politique à l’université Paris 1 (1995-2009). Professeur des universités (Philosophie pratique moderne et contemporaine) à l’Université de Franche-Comté (Besançon) (2009-2012). Professeur d’éthique appliquée à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne (à partir de 2012).

Membre du Centre de philosophie contemporaine de la Sorbonne (en 2016). Membre de l'ISJPS, Institut des sciences juridique et philosophique de la Sorbonne (UMR 8103) (en 2024).