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Langue :
Français
Crédits
Université Paul Verlaine - Metz (UPV-M) (Production), Claude ROCHETTE (Réalisation), L'Université Numérique des Humanités (Production), Olgierd Kuty (Intervention), Jean-Marc Leveratto (Intervention)
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Creative Commons (BY NC)
DOI : 10.60527/gj7e-b610
Citer cette ressource :
Olgierd Kuty, Jean-Marc Leveratto. Canal Socio. (2009, 27 février). La négociation. [Vidéo]. Canal-U. https://doi.org/10.60527/gj7e-b610. (Consultée le 12 octobre 2024)

La négociation

Réalisation : 27 février 2009 - Mise en ligne : 25 mars 2009
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Descriptif

Une coproduction Université Paul Verlaine-Metz / Université Ouverte des Humanités

Cinquième et dernière partie de la Grande Leçon « La sociologie peut-elle aider à comprendre l’économie ? » Les auteurs vous proposent d’aborder avec Olgierd Kuty la question de la négociation, ses enjeux dans l’organisation du travail et, en filigrane, ses répercutions économiques évidentes. Une approche à la fois sociologique et historique de l'objet.

Depuis les années 1950, nos sociétés sont marquées par une régulation négociatoire. Elle est apparue dans les années 1930 aux Etats-Unis. Il faut donc distinguer trois moments successifs de négociation : la négociation silencieuse qui couvre les années 1933 à 1962, l'arrangement stratégique crozérien des années 1960 et 1970 (1963-1984) et l'accord normatif (Reynaud, Boltanski) depuis 1989. La nouvelle société de réseaux qui émerge depuis les années 1980 repose donc sur ce dernier type de négociation, marqué notamment par une « négociation des valeurs » (immanentes) et une procéduralisation.

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La négociation en France et en Belgique

On peut faire l’hypothèse qu’il y a deux cultures de la négociation fort différentes, en Belgique et en France. Nous retiendrons ici 3 pistes de recherche : le consensualisme, le pragmatisme et le couple Révolution/Réforme.

Les années 1800-1830 ont été cruciales pour l’apprentissage de deux traits fondamentaux de la culture politique belge. Il y a tout d’abord l’apprentissage du consensualisme dans les années 1820. Le consensualisme, c'est le refus de la loi du nombre, et donc la reconnaissance et l'admission de la pluralité d'opinions. En clair, celles des catholiques et des libéraux. C’est lié à une expérience traumatisante. En 1788, un an avant Paris, a lieu la Révolution belge dans la foulée des révolutions américaine et hollandaise. Les Belges chassent les Autrichiens. Mais l’union des catholiques et des libéraux vole en éclat lorsque les catholiques, les plus nombreux, persécutent les libéraux, ce qui permet un retour en force de Vienne. Ce sera l’expérience d’une indépendance ratée due à une désunion, une intolérance catholique. En 1828, les deux partis refont une unité nationale, et les catholiques comme les libéraux renoncent au principe de la majorité, c'est-à-dire à la loi du nombre alors que le principe majoritaire était d'application au même moment, à Londres comme à Paris.

Bien plus subtil est le second apprentissage, celui du pragmatisme, en 1835. Les Belges vont opter pour le refus des débats de principes. C'est une histoire étonnante que nous rappellerons très brièvement. Les catholiques belges inventent en 1828 le libéralisme catholique belge, ce qui leur permet une alliance avec les libéraux laïcs. Or le Vatican condamne ce libéralisme catholique : l’Église possède la Révélation et n’a que faire du libre examen, de la raison critique, de l’individualisme. On ne le sait plus aujourd’hui, mais en 1830, le poids du Vatican était diplomatiquement très important sur la scène européenne et, colossal dans un pays catholique comme la Belgique. Les évêques belges montent alors en ligne, et expliquent à Rome que si le principe est mauvais, l’application est bonne. Grâce à cette liberté, la situation a changé : c'est fini les tracasseries des Français, les persécutions des Hollandais. Les couvents se remplissent, les écoles catholiques se développent, les finances se portent au mieux, et les catholiques sont au pouvoir. Le Vatican laisse alors filer les choses. Les Belges ont appris une chose : négocier, c’est ne pas discuter des principes, mais parler uniquement de choses concrètes, de mesures précises. Les décisions concrètes rapprochent. C’est radicalement différent de la France et des grands débats lancés par les grands intellectuels français.

Enfin, troisième direction de réflexion : une piste de recherche comparant encore la Belgique avec la France et portant sur le couple Révolution/Réforme.

Il semble que l'imaginaire de la Révolution occupe une grande place dans la culture française tout comme le modèle belge de la négociation privilégie le Réformisme et rend compte du traditionnel sens du compromis des Belges.

Imaginaire, avons-nous dit. Pensons à la Libération et à Mai 68. Ces deux évènements sont vécus différemment. En France, la Libération de 1944 a été vécue comme la refondation d'une nouvelle société après la "Révolution nationale" de Pétain. Et à Paris, on parle également de la " La révolution de Mai 68 ". En Belgique, la Libération et Mai 68 n’ont pas été vécus comme cela. Comment faut-il comprendre ce thème révolutionnaire en France ? La révolution, ce n’est pas (d’abord et avant tout) le grand soir marxiste, la chute des possédants. C’est le thème profondément démocratique, très exigeant d’une République qui génère un homme nouveau : c’est la nouvelle naissance d’un nouveau citoyen qui rompt avec le passé. Cet imaginaire doit un peu à Machiavel et beaucoup à Rousseau.

Deuxième aspect, l'attente de révolution. Le mot attente renvoie aux années qui précèdent. Celles-ci sont vécues comme un moment pré-révolutionnaire : il y a le sentiment d’une crise profonde et intense de société, de civilisation, de régime, qui ne peut que se terminer brutalement par une rupture et une innovation radicale : les années 30 tout comme les années 60, en France, ont été vécues sur le mode d'une crise.

Ce vécu d’une situation de crise pré-révolutionnaire me parait absent en Belgique. Les membres du Congrès national de 1830 excluent explicitement toute référence à Rousseau, ils rejettent le thème démocratique de la participation populaire et de la régénération. Rousseau était inabsorbable. La Belgique est un pays massivement catholique qui n’a pas connu la lente et longue déchristianisation française du 18ème siècle et pour la culture catholique, l’homme reste un pécheur, il ne peut se régénérer sans l’aide de la grâce qu’une révolution politique ne peut remplacer 1 .

1 Sur la culture politique belge, on peut consulter Kuty (2005).

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Références

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