Conférence
Notice
Langue :
Français
Crédits
Nicolas Ruffini-Ronzani (Intervention)
Conditions d'utilisation
Droit commun de la propriété intellectuelle
DOI : 10.60527/hs50-wa18
Citer cette ressource :
Nicolas Ruffini-Ronzani. UVSQ. (2013, 22 novembre). Une histoire à usage politique : les Gesta episcoporum de l'évêque Gérard de Cambrai († 1051) et la construction d'un passé diocésain , in L'écriture de l'histoire au Moyen Âge (XIe-XVe siècles). [Vidéo]. Canal-U. https://doi.org/10.60527/hs50-wa18. (Consultée le 15 juin 2024)

Une histoire à usage politique : les Gesta episcoporum de l'évêque Gérard de Cambrai († 1051) et la construction d'un passé diocésain

Réalisation : 22 novembre 2013 - Mise en ligne : 4 mai 2017
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Descriptif

Intervention par : Nicolas RUFFINI-RONZANI (Université de Namur)

Sis au carrefour des aires de domination française, flamande et germanique, Cambrai constitue à la fois le siège de l'immense diocèse double d'Arras-Cambrai et le centre névralgique d'un petit comté gouverné depuis 1007 par de évêques comtes soumis aux empereurs. De 1012 à 1051, la charge pastorale y est détenue par Gérard Ier de Florennes, un prélat issu de l'une des plus puissantes familles lotharingiennes, dont la formation s'est partagée entre Reims et Aix. Bénéficiant de droits étendus, jouissant conjointement de l'auctoritas et de la potestas,soutenu par de puissants réseaux de fidélité,l'évêque dispose à Cambrai de nombreux atouts pour imposer son pouvoir dans une région à l'intérêt géostratégique évident. Et pourtant, à en croire le témoignage des sources contemporaines aux évènements, ses décisions s'avèrent régulièrement contestées par une aristocratie rétive à son pouvoir et par des bénédictins désireux de s'émanciper de la tutelle épiscopale. Afin de remédier à la mise à mal de son autorité sacrée, Gérard adopte dès les années 1020 une stratégie fondée sur le recours à l'écrit : s'appuyant sur les meilleures plumes de son entourage, i projette, entre autres, une restauration littéraire de l'autorité épiscopale en supervisant la production d'une série considérable de récits à caractère hagiographique ou historiographique.

Probablement rédigés entre 1023 et 1025, les Gesta episcoporum Cameracensium participent pleinement à cette stratégie de restauration de l'autorité épiscopale. S'adressant à une audience régionale, Gérard s'y livre à un important exercice de révision du passé diocésain, des origines de la cité à son propre épiscopat. Il cherche à s'y profiler comme l'héritier direct de ses plus prestigieux prédécesseurs – et en particulier des saints évêques Vaast et Géry –, à inscrire ses interventions dans le droit fil des leurs, et donc, indirectement, à s'y présenter comme l'incarnation terrestre du pasteur vertueux vanté par la Regula pastoralis,qui a considérablement guidé sa réflexion. La production des Gesta a imposé à son auteur de collecter, d'ordonner et de réinterpréter une documentation éparse mêlant diplômes carolingiens et ottoniens, Vitae de saints régionaux, chroniques locales et citations scripturaires. L'objectif de cette communication sera de déterminer comment, dans un but éminemment politique, Gérard et ses collaborateurs ont mis en oeuvre ces documents et narrations en leur conférant un sens nouveau.À cette fin, il s'agira tout d'abord d'identifier la documentation sur laquelle l'évêque Gérard a souhaité bâtir son oeuvre. Il conviendra ensuite de définir comment le prélat et son entourage ont choisi d'intégrer ces hypotextes à la narration,tantôt en les insérant tels quels – encore que… – à son récit,tantôt en les retravaillant et en gommant toute trace de reprise. Ce sera l'occasion de se pencher sur certaines des méthodes de travail de l'auteur, notamment lorsqu'il se trouve confronté à des informations visiblement contradictoires.Enfin, on s'efforcera de déterminer comment la sélection, l'ordonnancement et la mise en récit des hypotextes par Gérard et son entourage ont pu contribuer à renforcer symboliquement l'autorité de l'évêque sur ses contemporains.

On touchera ici à la fois aux questions de composition et de réception de l'oeuvre. Le recours au plus ancien manuscrit des Gesta,fragmentaire et peut-être autographe, et à ses annotations auton assez surprenant livrera d'ailleurs quelques indices sur la réception du récit dans le milieu canonial cambrésien du XIe siècle.

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