Cancérogénèse et exposition aux polluants : de la biologie fondamentale à la règlementation des substances cancérigènes

Cancérogénèse et exposition aux polluants : de la biologie fondamentale à la règlementation des substances cancérigènes

L'origine du cancer est une question centrale pour les biologistes. Même si Rachel Carson a établi le lien entre l'environnement contaminé par les pesticides et l'apparition du cancer dans les années 1960 (Carson 1962), la position hégémonique de la génétique a orienté la recherche académique vers les origines endogènes du cancer (Girel 2017; Proctor 1995). L’exposome, qui représente l’ensemble des facteurs extrinsèques auxquels les humains (Wild, 2005)  sont soumis (pollutions, stress, alimentation, lieu de vie et de travail, niveau de vie économique et culturel), a été moins exploré si bien qu’il existe un fossé épistémique et temporel sur la compréhension de l’origine des maladies chroniques. Pourquoi est-il si difficile de définir un agent cancérigène ?

Avec l'exemple des polluants persistants comme la dioxine et les hydrocarbures, de la consommation de viande rouge (classée cancérigène probable) et celui des pesticides (mélange retrouvé dans l’alimentation et les SDHI (inhibiteurs de la succinate déshydrogénase)), je vais illustrer l’apport des sciences fondamentales dans la production de preuves de cancérogénicité. Celles-ci peuvent et devraient servir de socle dans la mise en place de mesures préventives et dans l’amélioration de la règlementation des pesticides, répondant ainsi aux missions de la recherche en santé publique.

Biographie de Laurence Huc

Laurence Huc est toxicologue, directrice de recherche à l’Inrae. Elle travaille sur la cancérogenèse en lien avec les expositions aux polluants (hydrocarbures aromatiques polycycliques, dioxines, mélange de pesticides, SDHI). Elle coordonne 5 programmes nationaux (ANR, FRM, Fondation ARC, Ligue contre le Cancer, Ecophyto2+-OFB). Elle a mis en place le réseau scientifique pluridisciplinaire Holimitox en 2020 pour traiter la question de l’usage des SDHI selon une approche EcoHealth. Après 14 ans dans l’unité Toxalim de l’Inrae à Toulouse, elle vient de rejoindre l’équipe de Dominique Lagadic-Gossmann à l’Institut de recherche en santé, environnement et travail (Irset, Inserm UMR_S 1085) à Rennes et le groupe de David Demortain au Laboratoire interdisciplinaire sciences innovations sociétés (Lisis, UMR CNRS Inrae Université Eiffel) à Marne-la-Vallée. Elle est coordinatrice du réseau interdisciplinaire Holimitox , dédié à l’évaluation intégrée des pesticides toxiques pour la mitochondrie.