Eneour Toullec. Un patron pêcheur psychologue

Eneour Toullec me reçoit en 2020 chez lui à Quimper, cet ancien patron pêcheur m’a été recommandé par Denis Drevillon, jeune matelot rencontré à Concarneau — qui est aussi le protagoniste d’un petit film — qui a embarqué avec lui en tant que mécanicien et avec lequel il a tissé un lien quasi filial, lui transmettant de nombreuses connaissances et lui donnant des conseils pour sa vie privée. À la retraite depuis 2019, Eneour Toullec continue de transmettre son savoir aux plus jeunes en enseignant à l’école de pêche du Guilvinec. Il n’est pas lui-même issu d’un milieu de pêcheurs mais du milieu agricole de Plonéour-Lanvern. Il l’est devenu suite au déménagement de ses parents dans le port de Loctudy, dont sa mère d’origine paysanne était originaire, côtoyant alors le milieu maritime. Il a fait plusieurs formations depuis l’école de pêche du Guilvinec en 1980, mécanicien en 1988 à Douarnenez, lieutenant de pêche en 1986 à la Rochelle, et enfin capitaine de pêche à Nantes en 1998. Eneour Toullec a surtout exercé la pêche au chalut à la langoustine au début de sa carrière au large des côtes irlandaises sur un chalutier français (Scapeche). Puis à partir de 1996, il a pratiqué pendant deux ans le filet en Espagne sur un chalutier de Concarneau transformé en fileyeur qui appartenait à un armateur espagnol et comprenait un équipage essentiellement espagnol mais qui naviguait sous pavillon français afin de pouvoir conserver les quotas français attribués par l’Europe ; comme les diplômes des patrons espagnols ne sont pas reconnus en France, des marins français embarquent comme patron sans pour autant y exercer cette fonction mais celle de lieutenant ou de second patron, précisément de « patron porteur ». Entre 2000 et 2008, Eneour Toullec décida d’acheter un bateau d’occasion qui s’appelait Le cèdre bleu immatriculé à Loctudy mais le coût des bateaux à cette époque étant très élevé (1 million 200 000 euros) — et cela le reste aujourd’hui puisqu’un petit bateau de 16 ms pour la pêche artisanale à la langoustine vaut tout équipé 1 million 800 000 euros —, ce prix exorbitant associé à une pêche médiocre, une série de pannes, et surtout en 2007 et 2008 le prix croissant du gasoil, l’a amené à faire subventionner la destruction de son bateau par un plan de sortie de flotte puis à embarquer pour Intermarché à Lorient jusqu’à la fin de sa carrière. Il constate qu’à cette période un quart de la flottille qui pratiquait la pêche au large a disparu suite à la flambée du prix du gasoil. Cela correspondait par ailleurs à un moment où l’industrie off-shore recrutait, aussi beaucoup de marins du littoral français notamment bretons sont allés travailler en Afrique sur les plateformes pétrolières, ce qui fut le cas de Philippe Déru, protagoniste du film en ligne Le Moineau, le bar à la barre, qui, partit faire ce travail à Pointe Noire au Congo, pour améliorer sa retraite, y mourut en 2013.