Usage de la rafle en vinification

S’il est une pratique dans l’œnologie moderne dont l’usage est encore piloté par l’empirisme et la sensibilité du vigneron, c’est bien la technique consistant à apporter de la rafle en vinification. Il nous est donc apparu important de chercher à y apporter un peu de précision.

Notre intérêt pour la rafle se place dans la continuité de plusieurs travaux. D’abord ceux de Blandine Crétin (2016) menées sous la supervision d’Axel Marchal de l’ISVV qui ont évoqué la présence de l’Astilbine, polyphénol déjà identifié qui pourrait apporter la saveur sucrée aux vins. Par ailleurs, les travaux de Xavier Poitou et Magali Picard à l’ISVV ont abouti à l’identification de plusieurs composés pouvant intervenir dans la perception de fraîcheur aromatique.

L’objectif de Derenoncourt Consultants est d’utiliser ces connaissances nouvelles pour apporter des réponses concrètes aux questions que se posent les vignerons. Une meilleure connaissance de la rafle permet de rationaliser son utilisation et donc de l’adapter aux objectifs de chacun en tant qu’ingrédient dans la vinification.

Nos travaux ont été menés dans 7 châteaux de 6 appellations bordelaises, sur les deux rives de la Gironde durant 4 millésimes. La partie analytique a été assurée par notre partenaire le Laboratoire Excell. Une partie des résultats a été publiée dans la Revue des Œnologues de juillet 2021 (Vinification avec les rafles 2021 Pauline Gers et al.).

Nous avons d’abord vérifié que l’apport de cet ingrédient n’entraîne pas d’augmentation significative de la concentration de pesticides dans le vin. Nous nous sommes ensuite appliqués à déterminer les concentrations en Astilbine et Salicylates des rafles de nos cépages Bordelais.

Il nous a aussi semblé important d’évaluer l’impact des choix du vinificateur dans l’expression apportée par la rafle tant au niveau des éléments spécifiques qu’au niveau des caractéristiques analytiques classiques d’un vin rouge.

Enfin, en nous concentrant sur les rafles d’un seul cépage, nous avons cherché à déterminer si l’analyse visuelle d’une rafle pouvait être pertinente pour déterminer la qualité. Afin de reproduire les conditions de la vinification, ces rafles sont mises à macérer plusieurs jours dans une solution hydro alcoolique. L’analyse olfactive des macérats obtenus (issus de rafles d’apparences semblables) par un « nez » parfumeur professionnel puis par une analyse en chromatographie gazeuse couplée à un détecteur de masse, nous a permis de connaître les caractéristiques aromatiques de chacune des rafles. Nos travaux montrent que derrière le terme générique de rafle se cache un ingrédient subtil dont l’usage peut se piloter grâce à des connaissances nouvelles à partir desquelles chaque œnologue peut faire son expérience.

>> Frédéric Massie, Œnologue, Derenoncourt consultants